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Calella de Palafrugell, Llafranc, Tamariu, Comme un rêve de mer

02 Juin Calella de Palafrugell, Llafranc, Tamariu, Comme un rêve de mer

A deux pas de Palafrugell et de son noyau urbain se découpe un des plus beaux sites côtiers de la Costa Brava, hérissé de deux caps qui s’élancent vers le large, le Cap Sebastià et le Cap Roig. Un paysage minéral de criques douces, de pins parasols acrobatiques et d’eaux au bleu insolent.

Trois villages de pêcheurs ont jeté l’ancre au milieu de ces criques enchantées : Calella de Palafrugell, avec son nom soyeux qui semble sentir la cannelle, Tamariu et son grand vent de fleurs porteur de tamaris et enfin Llafranc qui semble s’élancer comme un « llagut » (barque catalane), le long des rochers de la côte. Trois sites enchanteurs à découvrir par voie de terre ou de mer, de promenade maritime en chemin de ronde, ou de plage en crique. Point commun, outre la beauté irréelle de la côte, les maisons de pêcheurs chaulées à deux étages, dont le rez-de-chaussée joliment voûté accueillait autrefois les barques hissées haut sur le sable et les galets.

Gare au vent

Ainsi, les embarcations étaient bien à l’abri de la tempête et des coups de semonce de la tramontane, plus terrible encore sur l’Empordanet où elle ne parvient qu’après avoir léché les sommets les plus hauts des Pyrénées, qu’elle ne l’est en Roussillon. Callela, une des plus anciennes destinations touristiques de la Costa Brava, sourit de toutes ses maisons blanches, si souvent représentée par des peintres, si souvent photographiée pour éditer des cartes postales qu’on a l’impression de retrouver une vieille connaissance. Si proche de la Grèce aussi, dans le déploiement de ses terrasses, sa profusion de blancs et de bleus, que les vagues incertaines semblent danser sur un air lointain de sirtaki.

Ancien port marchand

Il faut dire que l’ancien village de pêcheurs a limité au strict minimum ses concessions à la modernité, et a conservé, de crique en crique, une belle authenticité qui n’est pas sans évoquer sa cousine plus septentrionale, Cadaqués, avec ses belles plages, la platja del Canadell ou celle del Calou. On a peine à imaginer qu’au XIXe siècle, Calella était un port marchand spécialisé dans l’exportation de céréales, de vin, mais surtout de corail et de bouchons, avant de se faire damer le pion par Palamós. Au sud de Calella, commence le site naturel de Castell-Cap Roig, une merveille minérale toisant fièrement la mer. C’est ici qu’en 1927, un couple de riches Américains tombe amoureux de ce paysage de naissance du monde et lui donne un destin insolite. Sur les terrains qu’ils ne tardent pas à acquérir, ils construisent un château et dessinent un parc magnifique qui descend ses terrasses de plus en plus sauvages à l’approche de l’eau, jusqu’au ras des flots et les relie par un escalier de pierre ponctué de cyprès. Architecture et nature se fondent dans une profusion de fleurs, de cactées, d’arbres méditerranéens, de fragrances sucrées, dans les vrombissements lancinants des insectes butineurs et les cris aigus des mouettes et des goélands. à ces sons viennent se mêler, tous les étés, les plus belles rumeurs du monde, sous la forme d’un festival devenu un must des tournées internationales des plus grandes stars : Le Festival de Cap Roig.

Festival de premier plan

Sous les étoiles, face à la mer, parfois soulignée des vagues fraîches des rafales des vents du levant, festivaliers et artistes partagent le bonheur d’un coin d’Eden. Et le miracle se perpétue tous les étés, mêlant dans un joyeux désordre nationalités et générations. Pour les amoureux des chansons de terre et de mer, d’exil et de large, Calella n’a pas son pareil. Elle est en effet la capitale incontestée des havaneres, ces chants de marins chaloupés et un rien mélancoliques ramenés des campagnes de Cuba et de la Caraïbe.Tous les ans, la cantada d’havaneres se déroule le premier samedi de juillet dans la sublime crique de Port Bo, au centre de laquelle flotte la scène. Des milliers de personnes entassées sur la plage ou juchées sur des centaines d’embarcations, au coude à coude dans la baie, assistent au spectacle et reprennent souvent les refrains en chœur. La Cantada d’havaneres constitue depuis cinquante ans l’un des incontournables de l’été catalan. Elle est suivie de l’indispensable dégustation de cremat, un délicieux café au rhum flambé, une spécialité ramenée elle aussi de la Caraïbe qui monte vite à la tête sous le ciel d’été.

D’ici et d’ailleurs

Dans cette débauche de sons, le classique a toute sa place en l’église Sant Pere de Calella, un diamant blanc posé sur les lauzes, qui accueille chaque été, en juillet et août, un cycle de concerts remarquables. Tant au niveau des compositeurs que des artistes, on devine un bel équilibre entre Catalans et étrangers.

Le tumulte des siècles

L’occasion de découvrir ou redécouvrir Mompou, Toldrà, Granados, Albeniz sur la terre qui les a vus naître et qui a inspiré leurs œuvres. Beaucoup de grands musiciens passés à la postérité comme « Espagnols » sont Catalans. Un peu plus au nord, Llafranc réussit une synthèse improbable : être un spot populaire sans cesser pour autant d’attirer une clientèle internationale argentée en quête d’authenticité. L’église Santa Rosa de Lima, aux murs impeccablement blancs, semble rêver de Mexique. Construite sur une butte qui domine la plage, elle y succède en beauté à une acropole grecque et à un cimetière romain. D’ailleurs, juste à côté, le grand pressoir à vin rappelle l’odyssée des peuples anciens sur ces terres. Une belle promenade maritime, bordée de terrasses de cafés et de restaurants, se prélasse jusqu’au port nautique. Au-delà, après avoir traversé la Cala Pedrosa, c’est Tamariu. Mais entre les deux villages se dresse le cap Sant Sebastià qui concentre quelques joyaux patrimoniaux comme le village ibère qui existait entre le VIe av J-C et le Ier siècle de notre ère, découvert grâce aux fouilles menées devant l’ermitage de Sant Baldiri. Au sommet de la montagne de Sant Sebastià, s’élève le phare, construit en 1857, d’une hauteur de 165 mètres, l’un des plus puissants de Méditerranée.

Les trésors des pêcheurs

Juste à côté, un belvédère niché dans les plantes grasses, les pins et les aloès offre des vues à couper le souffle sur la mer et les ports alentour. Histoire de faire bonne mesure, le Moyen âge n’est pas en reste avec une tour de défense du XIIe, construite pour alerter les habitants en cas de razzia barbaresque, un véritable fléau pendant plusieurs siècles pour ces villages exposés. Si vous aimez marcher, ne boudez pas votre plaisir et suivez le chemin balisé qui mène à Tamariu par les falaises de la Cala Pedrosa, c’est un itinéraire magnifique face à la belle bleue qui traverse un lieu magique, la Cala Xelida, une charmante crique ornée d’une ancienne maison de pêcheurs. Ensuite, l’ancien chemin de ronde, par endroits vertigineux au-dessus des falaises qui dentellent la roche, trace joliment jusqu’à la crique des Lliris, après 45 minutes de bonheur. Sur la plage de la crique s’élève une ancienne maison commune où les pêcheurs avaient coutume de stocker leurs outils et instruments de pêche, leurs vêtements, leurs ustensiles de cuisine, leurs filets et tout le matériel nécessaire au ravaudage. Encore quelques dizaines de mètres et voilà que se dessine un merveilleux village, si petit, si charmant, qu’il semble tout droit sorti d’un conte illustré et peint à l’aquarelle.

Quintessence de liberté

Tamariu est un petit village de pêcheurs, mentionné dès le XIIIe siècle dans les chroniques royales de la cour de Barcelone, qui ne compte hors saison que trois cents habitants, ourlé d’une jolie plage de sable épais. Le journaliste et écrivain Josep Pla considérait que Tamariu représentait dans sa modestie somptueuse, une quintessence de liberté. Les eaux, cristallines, sont particulièrement prisées des plongeurs attirés par de belles cheminées sous-marines. De l’autre côté de la baie, mais hélas uniquement accessible par mer ou par la route, car le chemin de ronde s’interrompt, la Cala Aigua Dolça ouvre ses bras de pierre et de pins au regard du promeneur. Ici, coule depuis toujours la source douce qui lui donne son nom, bienvenue dans la minéralité salée de la crique.

D’une eau à l’autre

Des pierres, semble monter un chant immémorial, celui des Grecs et des Romains si longtemps présents sur ces terres. évidemment, ce monde préservé offre au visiteur, outre les splendeurs que nous venons d’évoquer, les fondamentaux revisités de tout séjour en bord de mer : Les plaisirs de l’eau sous toutes leurs formes et pour toute la famille, de la plongée au kayak, du jet-ski à la simple baignade, et dans les conditions que vous souhaitez, car tout existe, des criques résolument sauvages aux plages suréquipées. Selon vos envies, vous pourrez caboter à bord des barques touristiques, ou encore embarquer pour une partie de pêche, et lézarder…

Mais aussi la ville et la montagne…

La proximité du noyau urbain de Palafrugell, avec ses nombreuses boutiques et ses marchés animés alliés à la présence d’un arrière-pays magnifique et propice aux excursions, parsemé de jolis hameaux médiévaux comme Llofriu ou Ermedas, et de sites préhistoriques comme le dolmen de Can Mina dels Torrents, permet de varier les plaisirs. La gastronomie locale, basée sur la rencontre inspirée des produits de la mer et du potager, participe de cette diversité qui interdit définitivement l’ennui. Calella, Llafranc, Tamariu, un monde à part à effeuiller comme une marguerite. Passionnément bien sûr.

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