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Parcs naturels : Escapade dans les collines secrètes

10 Fév Parcs naturels : Escapade dans les collines secrètes

Connue pour ses stations balnéaires, la région du Garraf cache aussi un arrière-pays sauvage, aux visages multiples. Au détour de trois parcs naturels, le Garraf, Olèrdola et Foix, se succèdent des éperons rocheux arides, des zones humides et des vestiges isolés. De quoi ravir les contemplatifs et les randonneurs, mais aussi les spéléologues et autres vététistes. Balade dans le Garraf secret.
Qui l’eut cru ? A deux pas de la ville festive de Sitges et de sa voisine non moins balnéaire Vilanova i la Geltrú, à quelques kilomètres à peine des ports de plaisance, des yachts de milliardaires et des longues plages de sable fin, se cache la partie la plus authentique de la « comarca » (région) du Garraf. Les amoureux de nature et de quiétude seront comblés : la région partage ici, avec ses voisines du Baix Llobregat et du Penedès, pas moins de trois parcs naturels. Le plus grand, que l’on nomme justement Parc du Garraf (12 000 ha), est le plus typique. Depuis la route qui longe la côte en venant du nord, les reliefs des collines se jetant dans la mer sont saisissants. Ce paysage de roches arides, virant au blanc calcaire, contraste avec le bleu profond de la Méditerranée. A hauteur du port de la Ginesta, entre Les Botigues de Sitges et le petit village de Garraf, une route grimpe sur la droite, à l’assaut de la Serra del Lladre. Elle débouche sur la Pleta, ancien pavillon de chasse de la famille Güell, qui aurait été conçu par l’architecture Francesc Berenguer, et est aujourd’hui un centre d’interprétation et d’information touristique. La route poursuit ses pérégrinations dans les collines, sous la protection de la Morella, le pic dominant du massif, situé à vol d’oiseau à deux pas de la mer, et pourtant perché à 596 m.

Parcs2Un palais surréaliste en pleine garrigue

Surréaliste dans cet environnement sauvage, la bâtisse qui se dévoile sur les hauteurs semble sortie de nulle part : la Plana Novella est un superbe palais de la fin du XIXe siècle, aujourd’hui musée et centre bouddhiste (notre encadré). A quelques encablures de là, le petit village d’Olivella sommeille dans ses collines de pins et de garrigue. Quelques ruelles dallées et arborées, de belles bâtisses en pierre, un château à proximité,… Et des lotissements groupés dans des lieux insoupçonnés, en pleine végétation. I   ci et là, on découvre aussi de grands mas. Tout autour du village, on devine la présence humaine, depuis des siècles. De nombreuses terrasses sont encore plus ou moins montées, des cabanes de bergers en pierres sèches restent visibles. Au loin, le surprenant massif de Montserrat se distingue, tel une boussole dans cette mer de collines. Le Garraf n’est pourtant pas abandonné des hommes.

Près de 500 cavités recensées

Au détour d’un chemin, on croise un groupe de chasseurs, des chercheurs de champignons, paniers à la main, des pratiquants d’escalade ou randonneurs, arpentant les nombreux chemins balisés. Mais du Garraf mystérieux, ce sont les spéléologues qui parlent le mieux. A Sant Pere de Ribes, charmante petite ville d’architecture romantique et moderniste située entre Olivella et Sitges, certains ont leurs habitudes au bar social Ger. Cette structure socio-culturelle et sportive a élu domicile dans une ancienne maison de maître du carrer del Pí, une charmante rue toute blanche flanquée d’un énorme pin. Le Ger propose, entre autres activités, la spéléologie. De nombreuses photos d’explorations sont affichées sur un mur. Derrière le comptoir, Daniel raconte, en passionné, la richesse souterraine du parc du Garraf. « On a recensé 462 cavités ! Des ossements d’animaux ont été trouvés, ils ont été envoyés au centre de paléontologie ». Le champ des possibles serait encore bien vaste. « L’objectif des explorations, c’est d’arriver au niveau phréatique » précise-t-il. Ces dernières années, la spéléo a suscité un grand engouement, boosté par la fascinante variété de gouffres et grottes, parfois bien visibles au détour d’un sentier… un véritable gruyère.

Un château les pieds dans l’eau

A quelques kilomètres au nord de Sant Pere de Ribes, à la limite du village de Canyelles, débute le parc naturel d’Olèrdola, plus modeste avec ses 600 hectares. Ici, la végétation est similaire à celle du parc du Garraf. On ne manquera pas, dans le secteur, l’ensemble monumental d’Olèrdola, site archéologique important occupé, tour à tour, par les Ibères, les Romains et au Moyen-âge. Dans la continuité du parc d’Olèrdola se trouve celui du Foix. Changement de décor : le long de la rivière Foix, la végétation est plus dense. On reste ébahi devant le superbe barrage qui s’étend aux pieds du village et du château de Castellet. Plus au nord, on atteint le château de Penyafort au terme d’un improbable circuit passant par une zone industrielle. Surprenant accès pour une si belle bâtisse, ancienne tour de défense du XIIe siècle et maison natale de Sant Ramon de Penyafort, canonisé en l’an 1601. Sauvage et nature à deux pas de la mer, l’arrière-pays du Garraf est aussi emprunt d’histoire… C’est en se laissant porter par le hasard, au détour d’un village ou d’une colline, que l’on en découvre toute la richesse.

Parcs3Aigles de Bonelli, tortues et oiseaux rares

Des massifs calcaires arides aux zones humides de la rivière Foix, les trois parcs naturels de la région du Garraf sont un havre de paix pour une faune et une flore variées. Dans le décor sauvage du parc du Garraf, fait de roches presque blanches, poussent des agaves, des figuiers de barbarie, mais aussi une multitude de palmiers nains, les seuls palmiers naturellement présents en Europe, ici dans leur région la plus septentrionale. Lorsque l’on plonge au fond des vallées étroites, on y découvre des roseaux communs, signe que malgré la sécheresse de ce massif calcaire, l’eau parvient parfois à se faire un chemin. Dans les nids d’aigles, vivent de nombreux reptiles et oiseaux. Entre autres rapaces, l’aigle de Bonelli, espèce menacée, trouve ici refuge. Dans la partie humide du parc de Foix, le long de la rivière et de l’étang de Castellet, la végétation change totalement. Dans les eaux bordées de frênes, tamaris et peupliers, vit une faune variée de carpes, d’anguilles, de « cachos » (sortes de gardons), de tortues et autres couleuvres d’eau. Une population également de hérons cendrés, canards, poules d’eau, grèbes, cormorans, balbuzards pêcheurs et autres oiseaux d’eau, que l’on observe pendant quelques jours ou à longueur d’année selon les espèces, et que l’on retrouve également à l’embouchure du Foix, sur la commune de Cubelles, au sein d’une petite zone humide désormais protégée.

Les folles rumeurs du palais Novella

L’excentrique Palais Novella a de quoi surprendre dans le paysage isolé des collines du parc du Garraf. Construit en 1892 par, semble-t-il, l’architecte Manuel Comas Thos pour un Catalan rentré fortuné des Amériques, Pere Domènech i Grau, il alimenta les plus folles rumeurs de fêtes et de luxure. Le Palais Novella appartient désormais à une communauté bouddhiste, Sakya Tashi Ling, qui y organise notamment des ateliers de relaxation et de méditation. Il est aussi le cadre d’un musée à deux volets, l’un sur le bouddhisme, le second sur le site en lui-même, avec sa chapelle, son salon doré, son bain néo-arabe, et même, son lac romantique.

Parcs4 Au château d’Odèrdola, tombes anthropomorphes et citerne romaine

Situé sur un éperon rocheux à la surface plane, le château d’Olèrdola dresse trois remparts naturels pour parer d’éventuelles attaques. Les Romains ont érigé une imposante muraille sur la quatrième face, toujours présente. Au sommet de ce petit plateau, l’église Sant Miquel scrute l’horizon depuis le XIIe siècle. Le site cache aussi une impressionnante citerne romaine, grand bassin creusé dans la roche et muni d’escaliers en pierre, et des ruines ibères. A l’extérieur de la forteresse, des tombes anthropomorphes sont creusées dans des rochers plats.

Castellet, un rempart du temps des Maures

Majestueux, dominant le village de Castellet et l’étang sur le Foix, le château de Castellet a vu défiler les siècles et leur histoire tourmentée. Mentionné dès 977 comme château « de Sant Estève », il fut construit stratégiquement sur la rive gauche du Foix, dominant le passage sur les terres de l’Alt et du Baix Penedès. Il appartint au Comte de Barcelone, à plusieurs familles féodales et servit de frontière avec le monde musulman, avant de perdre son rôle défensif et de servir de palais. Il appartient désormais à la fondation Albertis et se visite le week-end.

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