01 Juin De vert et de bleu
Plus de 30% de l’Empordanet sont classés en espaces naturels protégés ! une performance quand on songe à la variété des paysages concernés : dunes, rizières, criques, gorges, grottes, montagnes, lagunes, îles. Ici tout parle d’éternité.
Le massif du Montgrí est si omniprésent que l’imagination populaire s’en est emparée : ne dit-on pas qu’il ressemble à un évêque endormi dont le château juché sur ses crêtes figurerait la pierre de l’anneau épiscopal ? C’est lui qui définit la frontière entre les deux Empordà, en se glissant entre le Ter et le Fluvià.
Un monde à part
Un monde de chênes verts, de chênes liège et de pins qui dominent une garrigue odorante aux fragrances de romarin que les bruyères teintent de rose. Cette île minérale abrite des orchidées, des grands ducs et des escargots endémiques et quelques mas et hameaux, un temps désertés, aujourd’hui ressuscités par des amoureux de la nature. Il se jette dans la mer en dessinant de véritables fjords aux échancrures profondes, gravées de grottes et de falaises. Tout au bout, il égrène, juste en face de l’Estartit, les perles claires des îles Mèdes.
Egrenées sur la mer
Sept îlots battus par les vents et quelques récifs défient les flots : la Meda Gran, la Meda xica, le Carall bernat, les Tascons grossos, Redellot, les Ferranelles, Els tascons petits. Ils ont été habités jusqu’en 1934, après avoir été pendant des siècles une base idéale pour les pirates désireux d’effectuer des razzias sur la côte. Depuis 1983, la zone est protégée et instituée en réserve naturelle. Ses fonds, riches d’une faune et d’une flore exceptionnelle, font l’objet de visites en bateaux à fond vitré. En 2009, on a découvert une rivière souterraine à quelques mètres de la Meda Gran.
Magie des lagunes
Un peu plus au sud, à l’embouchure du Ter et du Daró, commence une zone d’aiguamolls, de marais et de lagunes qui est la deuxième de Catalogne après le delta de l’Ebre. La construction de canaux de drainage et de barrage a fait disparaître six lagunes et l’étang de Castelló dont la mémoire populaire garde l’empreinte. Ici, c’est le paradis des oiseaux : on en compte 327 espèces dont beaucoup de cigognes, mais aussi des poissons et des écrevisses. Les rizières qui existaient il y a quatre siècles sont peu à peu réintroduites. Depuis 1983, ces aiguamolls sont devenues un parc naturel.
La douceur des dunes
Au XIXe siècle, le cours du Ter a été modifié pour éviter l’ensablement crée par la Tramontane soufflant sur le golfe de Roses. Impossible ici d’utiliser pour la fixation des dunes les techniques utilisées en Aquitaine car ce vent arrive à l’oblique. Il a fallu inventer des remblais en biais et compter sur les espèces végétales autochtones. Ces plages douces, rares sur la Costa Brava sauvage et rocheuse, sont une respiration bienvenue.
D’autres montagnes
L’autre sentinelle montagneuse n’a rien à envier au Montgrí : les Gavarres dressent leurs monts jumeaux, Gavarra et Arques, au-dessus de la mer. A leur propos, Josep Pla évoquait des « formes éléphantesques ». Ici les hommes ont pris racine : les pentes portent la trace d’antiques terrasses de pierres sèches montées à dos d’homme, de moulins, de fours, d’églises ou de chemins. On croise même trois villages égarés : 950 habitants peuplent ce monde clos, classé espace naturel protégé en 1992.
Plus au sud encore, s’élève le massif des Cadiretes, granitique, abrupt, dont les forêts profondes, sont elles aussi classées et protégées.
Des bijoux
Et au milieu, deux bijoux naturels, les rizières de Pals suspendues sur les eaux, et les jardins botaniques de Cap Roig, plantés par deux excentriques russes au début du siècle et devenus le cadre de l’un des plus grands festivals européens, face aux îles Formigues et à la grande bleue. Partout, le long de la côte, les chemins de ronde accueillent les promeneurs : des kilomètres de plongée dans le bleu, un accès intimiste à des criques cachées et, au bout, des baignades fabuleuses.
Tous les chemins
Les randonneurs seront comblés par ces espaces intacts, balisés de dizaines d’itinéraires de tous niveaux conçus pour allier découvertes patrimoniales et émerveillement devant la nature. Et les cyclistes ne seront pas en reste : à ne pas rater, la voie verte qui unit Sant Feliu de Guixols à Girona, en empruntant le tracé de l’ancienne voie ferrée, ou l’envol à ras d’horizon entre deux bassins de rizière. Last but not least : les nombreuses pistes qui s’enfoncent à cœur de montagne et qui combleront les heureux possesseurs – ou loueurs – de 4×4.
Et bien sûr, n’oublions pas les chemins de mer. Tout cet univers s’offre à rebours depuis le large : longer la côte en kayak, emprunter un des innombrables bateaux de cabotage qui s’offrent aux vacanciers, musarder en jetski, ou simplement nager, palmes aux pieds, d’une crique à l’autre, et c’est le choc visuel assuré. Un choc que nos enfants et petits-enfants pourront connaître à leur tour dans l’éternité protégée de ce cadre unique.
Pas de commentaire