30 Mar Calella, les jardins et la mer
A cinquante kilomètres au nord de Barcelone à peine, au pied des 760 m d’élan du Montnegre, abrupt à force d’être pressée de dominer la mer, Calella étend ses trois kilomètres de plages et la rencontre magique de son histoire et de son sens de la modernité.
Son épopée industrielle, parallèle à celle de tous les environs de la capitale catalane est marquée par l’installation de grandes usines textiles, le départ de certains de ses fils à Cuba ou aux Amériques et surtout le retour de certains, cousus d’or et chargés de références exotiques. Voilà qui lui vaut, si l’on y ajoute son accessibilité, à équidistance de Girona et de Barcelona, un certain cosmopolitisme qui la consacre très tôt comme ville touristique. Les Romains avaient déjà repéré cette côte accueillante et praticable, propice à l’installation de ports, mais c’est à l’époque gothique, âge d’or d’une Catalogne tournée vers la Méditerranée et ses nombreux comptoirs et possessions, qu’elle se dote de son patrimoine le plus précieux à découvrir dans les ruelles secrètes de la vieille ville. Ces venelles laissent affleurer le plan médiéval, de fenêtre bilobée en impostes sculptées, autour de belles demeures gothiques et renaissantes : Can Salvador, Can Rodona, Can Galceran ou encore Can Bartrina. L‘église a été consacrée en 1564 sur un édifice plus ancien dont le fronton fut l’œuvre de Jean de Tours, médecin de Guillaume le Conquérant, puis évêque en Angleterre où il y transforma l’église de Bath en cathédrale. Urbaine, pétrie d’histoire, Calella l’est assurément. Ici, les terres meubles qui se faufilent entre la mer et la montagne comme autant de balcons étroits aiment hisser les couleurs des petits pois, de la fraise et de la tomate sur de petits carrés de potagers d’excellence que l’air iodé brumise tous les matins. Le Maresme est un véritable jardin et un temple gastronomique. à l’aube des temps, déjà, agriculture et pêche définissaient le cycle de survie des gens d’ici. On imagine Calella en belle brune aux yeux brillants, une espadrille dans le sable, une autre sur les rochers du Montnegre, le regard perdu vers le large, l’oreille tendue vers la chanson de la mer et les légendes des vagues, son sourire étoilé de soleil. La proximité des forêts profondes du Parc Naturel du Montnegre et du Corredor a permis l’enrichissement grâce à l’apparition de chantiers navals destinés à la construction des vaisseaux nécessaires au commerce entre l’Espagne et les Amériques. La Catalogne étant exclue de négoce direct avec le nouveau monde, elle n’a pu recueillir les fruits du libre échange avec celui-ci qu’à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, se contentant jusqu’alors de la construction navale. C’était l’amorce d’un destin qui deviendra résolument industriel, essentiellement dans le textile, avec de grandes usines qui, très vite, attirent des travailleurs venus de la Catalogne intérieure et du reste des Espagnes pour donner naissance à un melting pot linguistique et culturel.
Ailleurs n’est jamais loin
De cette période faste reste toute une série de bâtiments dus à l’équerre d’un même architecte local, Jeroni Martorell Terrats extrêmement marqué par l’empreinte moderniste, qui a su conférer une certaine harmonie, et même une identité unique à l’ensemble. On lui doit notamment la bibliothèque ou encore l’ancien abattoir municipal. Peintre et dessinateur Lluís Macaya, un « Indien » de retour des Amériques après y avoir fait fortune a fait construire ici une demeure sublime et unique, Can Lluís Macaya, aux belles céramiques bleues, imposant au passage un style totalement nouveau. Une immersion architecturale dans la ville, à « l’hora baixa », l’heure bleue des Majorquins ou de Guerlain vous ravira d’autant plus que les rues sont très animées : Calella bruisse d’activités qui n’ont rien de saisonnier. Restaurants et cafés jouent au coude à coude avec les boutiques de toutes sortes, répartis autour d’une quinzaine de placettes ombragées, et hôtels et maisons d’hôtes leur disputent la politesse. Ici, on a l’accueil chevillé au corps et on ne mise pas tout sur le diptyque mer soleil, bien au contraire !
Une ville en éveil
Avec ses trois kilomètres de plages de sable doré, ses eaux d’un bleu intense, ses deux parcs et sa montagne tutélaire, Calella est faite pour accueillir toutes les envies en toutes saisons. Que vous aimiez le cyclotourisme, les sports aquatiques, les longues séances de shopping ou la recherche de merveilles gastronomiques authentiques, vous êtes ici à bon port. La culture est à la fête toute l’année avec une densité impressionnante : festivals de très haute tenue (Screaming Festival, Nits d’Estiu, Festival Folklorique…), des concerts de guitare, des aplecs de sardane, des festivals de cinéma et de photographie, et un amour marqué pour le jazz comme si l’on ne sortait pas indemne des duos du vent et des vagues… Si bien que les ailes de saison attirent une noria de nouveaux visiteurs. Tous les plaisirs de la ville sont là pour interdire l’ennui. Ils sont sertis de paysages qui invitent à la fois à se dépasser et à s’abandonner à la douceur du farniente, un deux en un qui séduit de plus en plus à l’ère des grands week-ends et des vacances de printemps. Calella est une ville vibrante où les routines quotidiennes n’empêchent pas de répondre aux attentes des défis sportifs les plus exigeants comme le fameux parcours de l’Ironman de Barcelone, le Tour de Catalogne ou les Special Olympic Games entre autres. Pour les habitants de Calella, le sport représente la symbiose entre le corps et l’esprit. C’est un mode de vie. Si vous aimez marcher, pédaler, faire de la marche nordique ou simplement jouir de vues sublimes sur la mer, cap sur la montagne avec une première étape au Mirador de les Torrettes, les petites tours-relais qui permettaient autrefois de communiquer par télégraphe optique (il permettait à l’époque de transmettre des informations à une vitesse dépassant celle du déplacement physique). N’hésitez pas à poser votre sac ici. Comme pour vous accompagner et vous encourager vers les hauteurs, le phare, entièrement visitable et encore en fonction, un des plus hauts de Catalogne, vous attend. Il occupe la place d’une ancienne tour de défense idéalement située face au large. Là-haut vous serez surpris par l’omniprésence du vert qui dessine dans le tissu des maisons un chapelet d’oasis. Le Parc Dalmau, en plein milieu de la ville possède un joli chemin botanique et des sites bucoliques comme la fontaine des Lions ou la Cour de l’Ours, tandis que la promenade Manuel Puigvert, la promenade maritime magnifiquement arborée, revisitée par Jeroni Martorell – encore lui – qui en conçut les balustrades, les candélabres et les escaliers, reste l’axe symbolique de la ville. Elle est si majestueuse, si large, si proche d’une grande avenue urbaine qu’on s’étonne presque, en se retournant, de voir la mer ! Calella est un point de confluences où se retrouvent les amoureux inconditionnels de la mer, les fous de randonnée et de montagne, les familles en quête d’aventures à partager et tous ceux qui aiment la culture au sens le plus large du terme. Venez goûter aux mille et un charmes de la ville qui a banni l’ennui et cultive, aussi bien que ses jardins maraîchers, un art de vivre basé sur la curiosité et le désir d’ailleurs.
Pas de commentaire