01 Nov JOSEP TREPAT : un modeste génie
Au début du XXe siècle, la Catalogne rurale est encore en plein XIXe siècle : tout se fait à la main et à dos d’homme. Un petit artisan de Tárrega va impulser une mutation radicale et faire basculer le monde paysan catalan dans la modernité : il s’appelle Josep Trepat.
Seny i rauxa (bon sens et créativité)
A sa façon, Josep Trepat, fondateur de l’entreprise éponyme de Tárrega, est un authentique génie. Son apport à l’agriculture catalane du début du XXe siècle fut inestimable et compta pour beaucoup dans l’avance prise par la Catalogne sur le reste de l’Espagne en matière agricole : il permit une mécanisation générale en quelques années, en combinant trois données essentielles : l’efficacité des machines, l’adaptation de leur taille à la réalité des exploitations plutôt petites, eu égard aux contraintes du relief et aux traditions de petite propriété paysanne, et enfin leur accessibilité en termes de prix.
Une idée simple
Le déclic se produit en 1913, lors d’un séjour en France. Josep Trepat y découvre une moissonneuse-lieuse Mac Cormick et comprend immédiatement tout le parti qu’il peut en tirer. Dans son petit atelier, il travaille d’arrache-pied pour créer un modèle plus compact, tiré par un animal de trait au lieu de deux. Bientôt, naît sa moissonneuse catalane, la Dalladora Trepat, dont les lames sont adaptées à la taille de la luzerne : c’est une révolution pour les éleveurs qui en sont encore à l’époque, en 1919, à manier la faux. Fort de ce succès, Josep Trepat s’intéresse aux céréales et développe cette fois une moissonneuse-lieuse, la Garballadora-lligadora Trepat. Là encore, un seul animal de trait est nécessaire à sa traction. Le gain de temps et d’énergie est tel que le succès est immense et dépasse largement la Catalogne : il s’en vendra 33 496 ! Entre-temps, Josep Trepat, inventeur mais aussi chef d’entreprise avisé, s’est donné les moyens de produire ses propres machines en créant une usine modèle pour l’époque avec ses nefs géantes et son mécanisme à rouages, poulies et courroies incroyablement performant, une sorte de moteur géant et partagé qui fait encore école tant il est complexe et monumental.
Une page d’histoire
L’expansion maximale de l’entreprise se produit entre 1919 et le début de la guerre d’Espagne mais lors de sa fermeture, en 2004, elle comptait encore 550 travailleurs, et l’usine se divisait en dix-neuf immenses nefs. Aujourd’hui, les moteurs ont retrouvé le silence et ne s’animent que pour accompagner les visites : l’œuvre de Josep Trepat est devenue un musée de la mécanisation agricole, un fleuron du patrimoine industriel catalan, mais aussi un véritable centre de recherches pour les sociologues et une mine d’informations pour les enseignants. Dans son petit atelier de Tárrega, Josep Trepat a écrit une véritable page d’histoire catalane.
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