01 Mar Le Born : Un peu d’histoire
Le quartier du Born, devenu la coqueluche des jeunes Barcelonais, des artistes et des touristes amoureux des contrastes, est dabord un quartier médiéval, né de limmense expansion de la ville et du pays à lépoque gothique.
Le quartier du Born, plus largement celui de la Ribera est le deuxième quartier historique de Barcelone après le célèbre Barri Gòtic dont il fut séparé par la trouée de la Via Laietana au XIXe siècle. Né de l’expansion maritime et commerciale de la ville au XIIIe siècle, c’est un vieux quartier populaire qui a été longtemps protégé du tourisme de masse, malgré son charme fou.
Un hameau de pêcheurs
Le mot « Born » désigne à l’origine l’enceinte dans laquelle se déroulaient les tournois et joutes de chevalerie et désigne plus exactement la place ou plutôt la lice sur laquelle fut édifié le marché du même nom. Au début, le quartier n’était guère qu’un hameau de pêcheurs, situé au bord de la mer, car la Barcelonette que nous connaissons était une île, l’île de Maians. Y vivait un petit peuple de marins et d’ouvriers de toutes sortes, rassemblés autour d’une église, « Santa Maria de les Arenes » (Notre-Dame des Sables).
La cathédrale du peuple
La prospérité de la Catalogne aux XIIe et XIIIe siècles fit gonfler la population, qui s’enrichit de beaucoup de petits métiers venus d’autres régions du monde et conduisit les confréries d’artisans habitant le Born à se doter d’une église plus grande, digne de la population. Bastaixos, macips et marins mirent donc la main à la pâte pour transporter et transformer des milliers de pierres et galets de rivière. Ainsi naquit entre 1329 et 1383 la plus belle église gothique de la péninsule ibérique, et sans doute l’un des plus beaux exemples de gothique catalan, un miracle de finesse et d’équilibre gracile : Santa Maria del Mar. En 1428, la rosace s’effondra lors d’un tremblement de terre et bien sûr, en 1936, comme tant d’autres lieux sacrés, elle vit son autel et son mobilier brûlés. Santa Maria del Mar n’en reste pas moins un pur joyau architectural.
Un âge d’or
Au début, le quartier se trouve juste en dehors des remparts, on le connaît sous le nom de Vilanova, comme c’est le cas pour beaucoup de faubourgs. Puis, à la faveur de l’agrandissement des murailles, il se retrouve au cœur de la ville comtale, dont il devient vite l’un des fleurons, avec ses hôtels particuliers et sa Loge de Mer, symbole de la puissance maritime catalane, caractérisée par une galerie gothique à trois nefs et un plafond de bois. Construite en 1357, elle fut à la fois la chambre de commerce et un haut lieu de sociabilité. On y donna sous le règne de l’Archiduc Charles d’Autriche, la première d’un opéra d’Antonio Caldara, « Il più bel nome ».
Un trésor archéologique
Lors de la restauration du magnifique Mercat del Born, la plus belle halle en fer forgé de toute la Catalogne, construite en 1876, les archéologues découvrent un gisement archéologique de 8 000 m² qui raconte toute l’histoire du quartier. On y découvre un réseau d’égouts médiévaux sophistiqués, des rues, des maisons, des hôtels particuliers et la trace de multiples artisans : dinandiers, ferronniers, couvreurs, drapiers… ainsi que la marque indélébile et forte du Rec Comtal, un canal né d’un ancien aqueduc romain qui détournait les flots de la rivière Besos pour alimenter moulins, forges et cultures en eau. Plus curieux, le gisement révèle la présence d’une nécropole musulmane datant des IXe et Xe siècles et d’une seconde nécropole, romaine celle-là. On dispose donc d’un véritable instantané de la vie du Born pendant la période gothique, mais aussi de la preuve de son peuplement très ancien.
Un quartier qui a souffert
Du Couvent Sant Père de les Puelles, situé à la lisière du quartier, ne subsiste que l’église, consacrée en 945. Le reste fut ravagé par un incendie en 1909, puis totalement détruit pendant la terrible guerre d’Espagne. La communauté bénédictine s’exila à Sarrià, lors de la désamortisation.
Un temps à l’abandon
Il semble que, comme tout le reste de la Catalogne, le quartier ait subi de plein fouet le déplacement des grandes routes maritimes de la Méditerranée vers l’Atlantique et soit entré en déclin dès le début du XVIe siècle, déclin achevé par la défaite de 1714 contre les troupes de Philippe V, qui valut au quartier d’être en partie rasé, avant que l’on n’y installe la Ciutadella. A côté de Santa Maria del Mar, ne pas manquer le « Fossar de les Moreres » où reposent les soldats qui tinrent tête au souverain espagnol et le payèrent de leur vie.
Retour au glamour
Aujourd’hui, lacis de ruelles et venelles médiévales, maisons vénérables aux façades patinées, passages voûtés presque secrets comme le carrer de l‘Arc dels Tambourets ou le carrer dels Ases, tout rappelle un âge d’or, quand le Born était le siège de joutes et de tournois. Dans le carrer Montcada ne manquez pas de merveilleuses demeures seigneuriales, comme le Palau Dalmases et son splendide escalier d’honneur qui héberge un café, ou bien la maison de Cervelló qui abrite la fondation Maeght ou encore celle des Comtes de Santa Coloma avec une magnifique cour à galerie ogivale. Ce patrimoine extraordinaire a favorisé l’implantation de structures culturelles uniques, et dans leur sillage, l’installation d’une nouvelle population de créateurs et d’artistes. Résultat, aujourd’hui, le Born est devenu un must !
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