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Les Guilleries, une terre d’’eau

01 Avr Les Guilleries, une terre d’’eau

Longtemps affublée de qualificatifs peu enclins à son développement économique, l’eau de la Selva fait couler beaucoup d’encre et est en passe de devenir l’une des régions de Catalogne les plus dynamiques sur le plan touristique.
Tout comme le Montseny, les Guilleries capturent les nuages chargés d’eau venant de la Costa Brava. Des milliers de sources permettent une biodiversité sans égale. La richesse aquifère des lieux permit à de vastes forêts pratiquement impénétrables de se multiplier et de pouvoir cacher des armées entières. Le bandolerisme, ces troupes de brigands de grand chemin, y trouvait refuge pour panser ses plaies et préparer ses futurs pillages. On ne parlait de Guilleries qu’avec crainte, pour s’y rendre, il fallait avoir fait son testament. Aujourd’hui, juste une valise et une trousse de toilette suffisent pour profiter d’une offre thermale et Spa particulièrement abondante, en pleine mutation et porteuse de tous les espoirs.

guilleres3Des eaux miraculeuses

Tout commence par une légende. Une vache qui urinait du sang, condamnée par ses propriétaires, se serait guérie peu à peu en allant boire une eau plutôt désagréable tant au goût qu’à l’odeur. Cette fontaine sortait de terre près de la rivière d’Osor, elle était connue par les paysans du coin, comme La Font Picant, la fontaine piquante, car elle piquait autant les narines que le palais. En 1779, le docteur du village, J. Gravolosa intrigué par cette histoire va faire boire cette eau à ses malades présentant les mêmes symptômes, puis pour toutes les maladies de circulation sanguine. Naturellement gazéifiée, il la décrit comme une eau qui casse les bouteilles si elles sont trop remplies et trop bien fermées. Les premiers malades ne vont pas hésiter à braver les kilomètres en diligence, à dos de mulets et à pied, pour aller boire cette eau magique de Sant Hilari. Ce qui ne devait pas être facile pour ceux qui souffraient de la goutte. En 1822, le Diario de Barcelona publie un article qui regrette que l’invasion de factieux (les bandits de grands chemins) prive de nombreuses personnes du bénéfice de pouvoir ramener « dans leurs malles », les eaux de Sant Hilari Sacalm.

Les eaux se commercialisent

C’est autour de 1850 que les Barcelonais peuvent acheter les premières bouteilles de la Font Picant chez les apothicaires de la capitale. Le train arrive jusqu’à Girona et ce sont les Traginers (muletiers) qui assurent le transport de la fontaine jusqu’à la gare. Pour les malades, il faut compter trois heures de train en venant de Barcelona, auxquels s’ajoutent trois heures de plus en diligence. Seuls les malades les mieux portants pouvaient profiter des eaux bénéfiques. Au village, les habitants commencent à entrevoir la possibilité de louer des chambres, lorsque la première des trois guerres carlines éclate. A nouveau des hommes en armes vont sillonner le pays détruisant tout espoir de développement pour les Guilleries. Elles redeviennent infréquentables.

Reconnue d’utilité publique

Les guerres de successions monarchiques passées, un nouvel espoir semble renaître. Le 31 décembre 1879, les eaux de la Font Picant sont reconnues d’utilité publique par la Société Espagnole d’Hydrologie. Un premier édifice est construit au pied même de la fontaine. Les premiers visiteurs arrivent d’Amérique du Sud et du reste de l’Europe. Les Espagnols et les Catalans suivront le mouvement, curieux de ce succès international. Des bouteilles s’exportent dans les colonies, Cuba, Philippines et même à New-York. Le Romantisme aidant, les curistes découvrent les bienfaits de la nature, mais s’ennuient un peu. Alors, promiscuité oblige, cette haute bourgeoisie commence à organiser ses premières fêtes, et, à une époque de moralisme exacerbé, débutent les premiers bals masqués, qui permettent bien des audaces. Avec ce tourisme balnéaire, c’est le tourisme lui-même qui vient d’apparaître pour la première fois en Catalogne.

guilleres2Une visite obligée

C’est un véritable village qui va peu à peu se construire tout autour des fontaines. La manne financière que représentait cette affluence de grands bourgeois de l’Europe entière va attirer quantité de commerçants, de vendeurs de service et de profiteurs de toutes catégories. Il fallait bien divertir tous ces oisifs qu’ils soient artistes, peintres, politiques, médecins, prêtres, militaires ou industriels. Si l’eau devait être prise obligatoirement à jeun et de bon matin, cela permettait d’avoir quartier libre une grande partie de la journée et jusqu’à tard le soir. La guerre civile puis la seconde guerre mondiale mettent un coup d’arrêt brutal au secteur thermal. La paix retrouvée, les établissements s’adaptent et s’ouvrent à une plus large clientèle. Ce qui autrefois était synonyme d’opulence, se démocratise et devient à la portée des classes moyennes. C’est la ruée vers l’eau et ses bienfaits qui n’en finissent pas d’attirer un public toujours plus large en quête de bien-être, mais aussi de distractions. La Selva en offre chaque année davantage en choix et en qualité. On n’y propose pas uniquement du thermalisme mais aussi une gastronomie riche comme en témoignent les cuisinières de Sils ou le restaurant étoilé d’Anglès « l’Aliança ». Des découvertes, sports d’aventure, balades à pied, à cheval, en quad, en vélo ou en ballon, font de cette région thermale, une source intarissable de plaisirs.

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