30 Mar Palamós, la ville des amours
Selon une légende tenace, le roi Pere II « le Grand », charmé par la baie, aurait déclaré en accordant la charte de peuplement au village primitif, Sant Esteve de Mar, « C’est une ville pour les amours » (per als amors), donnant ainsi à Palamós une étymologie pleine de promesses. Et c’est vrai que la baie est belle, ourlée de miradors et de chemins de ronde, creusée de plages qui alternent sable et galets, sertie dans l’étreinte minérale de rochers énormes souvent couronnés de pins. Juste derrière s’élève le joli massif côtier des Gavarres, abrupt et sauvage avec ses forêts drues de chênes-lièges et de chênes verts et ses garrigues odorantes. Palamós s’est construit juste entre les deux, en cercles concentriques : le centre ancien, l’agrandissement industriel, puis les mas, disséminés dans le vert. Pendant des siècles, la mer et la terre ont dicté la vie des hommes, partagée entre la pêche et l’agriculture puis, à la fin du XIXe siècle, tout s’est bousculé : le liège a donné lieu à des structures industrielles, la mer s’est ouverte au monde. Vers le milieu des années 1970, ce nouveau monde a sombré sous les assauts conjugués du tourisme et de la navigation de plaisance. Mais il en faudrait beaucoup plus pour altérer l’âme bien trempée de Palamós ! Au contraire, la ville a manifesté à chaque étape de son histoire une belle vitalité et une capacité naturelle à se réinventer ! Le patrimoine bâti, remarquable, est en première instance religieux. L’église paroissiale Santa Maria, construite en 1417 sur une chapelle antérieure, de style gothique tardif, possède un magnifique retable dû au peintre néerlandais Isaac Hermes Vermey. C’est le bâtiment le plus ancien de Palamós. L’église du Carme, baroque, abrite le centre d’interprétation du patrimoine et une très jolie exposition des œuvres du peintre local, Ezequiel Torroella, un paysagiste lumineux. à Sant Joan de Palamós, le village d’origine devenu simple quartier de la ville, Santa Eugenia, brode son fronton frangé de marbre blanc sur la noble austérité des pierres grises. La promenade au fil des rues est un monde de sensations, avec des petits magasins qui allient produits locaux, mode, technologies et services de toute sorte, un va-et-vient permanent de gens affairés et de badauds qui discutent au beau milieu du passage sous le regard des clients des nombreuses terrasses de café. On est à mille lieues d’une station balnéaire centrée sur ses premiers estivants, ici la vie locale est foisonnante. Autour des élégantes ruines de l’ancien couvent des Augustins, une jolie série de voûtes qui suggère la présence fantôme d’un cloître, s’étend le quartier du Pedro, à la fois populaire et méditerranéen. En avançant vers la mer, on note la présence plus dense de bâtiments industriels qui illustrent l’essor du travail du liège, au XIXe siècle, au plus fort des exportations de vin. Au fil des siècles, Palamós ne s’est jamais endormie sur ces énormes filets que ravaudent encore quelques hommes à même le quai ! Il faut dire que la mer est partout. C’est elle qui mène le bal des activités humaines. Palamós a su rester un port de pêche très actif, le premier de la région de Girona. à la criée se joue un véritable numéro de virtuosité verbale et commerciale, on reconnait nombre de restaurateurs locaux, nords-catalans ou encore venus de l’Aude pour ne rien perdre des merveilles gastronomiques du jour fraîchement débarquées. « Je viens ici trois fois par semaine », explique Pascal, chef étoilé. « Et j’y trouve toujours mon compte. Souvent je passe directement commande aux pêcheurs ». Ici les crustacés, notamment les langoustines et la fabuleuse gamba, objet d’une indication géographique protégée, disputent l’affiche aux poissons blancs et bleus. Le marché aux poissons, coloré, le verbe haut, est comme une pièce de théâtre juste jouée pour vous par les ménagères qui marchandent et les marchands qui haranguent.
De mer venue
Le poisson reste le vrai maître des lieux, décliné sur les céramiques, sur le papier huilé, allongé sur la glace et ruisselant de fraîcheur. à 7 heures du matin, tous les jours, un attroupement se constitue sur la jetée pour assister à la sortie des bateaux ventrus, vaillants sous le vent. Port de pêche avant tout, Palamós offre sur son front de mer et les rues adjacentes toute une série de petits restaurants typés. Toutes les saveurs de la Costa Brava vous y attendent, souvent métissées, sublimées par des alliances au goût de haute mer. Un monde de convivialité qui culmine avec l’Espai del peix (l’espace du poisson) haut lieu culinaire et gastronomique : cours, conférences, dégustations, de quoi vraiment tout savoir sur les hôtes des flots ! Mais Palamós est aussi un port de plaisance bien équipé pouvant recevoir de grands paquebots de croisière, une des activités les plus florissantes de la ville qui remplace depuis quelques années, pour de nombreuses compagnies, l’escale barcelonaise, avec toutes les retombées économiques que cela représente.
Au fil de vos envies
« Palamós a trouvé un nouveau souffle avec ces grands paquebots, les retombées sont excellentes » confirme Silvia, agent de tourisme. Au cœur du printemps, dans les senteurs des pins et des fleurs, la chanson de la mer invite à longer les plages en suivant le chemin de ronde, à partir du vieux château du XIIIe siècle aujourd’hui transformé en mas, jusqu’aux plages de Calella de Palafrugell. Après les tronçons de plage douce et urbaine qui longent la promenade maritime, il domine le port, la Cala del Morro de Vedell (baie du museau de veau) ou encore la baie Margarida. Puis direction par la montagne du Cap Gros pour accéder à la petite baie de la Fosca, paisible, entourée de demeures cossues, annonçant un chapelet de merveilles. Pour commencer la miniature de village de pêcheurs aux petites maisons chaulées de la minuscule baie de S’Alguer, de vraies cabanes de pêcheurs qui évoquent irrésistiblement les cabanons de l’Estaque ou les villages crétois arrimés à la roche. « Ici, je me ressource ! », raconte Toni, cuisinier. « J’y fais griller des gambas, j’y invite mes amis, c’est un lieu qu’on ne partage pas avec n’importe qui ». Au cœur de ce paysage méditerranéen, l’une des dernières plages vierges de la Costa Brava, la plage de Castell, se dérobe aux regards.
Pour mieux voir la mer
Maintenue dans son état naturel par pure volonté politique, elle offre un environnement totalement intact, très prisé des randonneurs et des photographes. Un peu plus loin, les ruines d’une antique ville ibère juchées sur la butte de Sa Corbatera, puis, la Cala Estreta, la baie étroite, enserrée de rochers déchiquetés où se dresse une vieille cabane de pêcheur à voûte catalane, un bijou architectural inattendu. Bien sûr, libre à vous de quitter le chemin de ronde où le sentier côtier pour gagner le ras des vagues, lézarder sous le soleil, ou même tenter une baignade précoce, bien à l’abri du vent ! Côté montagne, l’ermitage de Bell-Lloc se dresse pour offrir son mirador naturel, au cœur d’un réseau de sentiers qui invitent à la randonnée pédestre ou en VTT sous les arbres, avec en prime, de belles effractions sur le vertige du large. Les ruines du château de Vila-Romà révèlent encore la silhouette imposante d’un donjon crénelé. D’ailleurs, vous pouvez vous offrir la route des miradors : la place murée, en ville, qui domine le port, la pointe du quai neuf, le phare, le quartier du Pedro, l’ancien moulin à vent qui a servi de refuge anti-aérien pendant la guerre civile, les arêtes aiguës du Cap Gros offrent des vues à couper le souffle. Depuis la pinède d’En Gori, les îles Formigues émergent en une constellation de rochers sombres jetés sur le métal des eaux. Plus loin, la montagne révèle le dolmen de Montagut qui semble pencher son éternité sur la beauté de ce paysage tranquille. à tous ceux qui veulent se mesurer à la mer, Palamós offre une large gamme de possibilités : faire de la voile, de la plongée, louer des bateaux, faire du windsurf ou du ski-bus, se livrer à tous les sports nautiques imaginables, cela va sans dire, mais aussi s’initier à a pêche à la gamba, à la langoustine ou au poisson bleu à bord d’une authentique barque de pêcheurs avec la « pescaturisme », un loisir très apprécié de toutes les générations et particulièrement agréable au printemps. Il présente l’avantage d’un contact chaleureux avec des gens du cru. « C’est le plus authentique que nous puissions offrir, l’art de générations et de générations de gens de mer qui se sont succédés » précise Enric, pêcheur. Ça se passe comme ça à Palamós, le port multiple vous prend dans ses filets, ses saveurs, ses odeurs et les bras doux de ses plages. De plus, l’étreinte musclée de ses chemins de ronde vous donne l’impression que vous venez tout juste d’arriver chez vous !
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