
01 Août Rencontre avec Alexandra Ramoneda
Alexandra Ramoneda est la directrice des Thermes de La Preste, nichés tout en haut de la vallée du Tech, au cœur même de la Réserve Naturelle. Une quintessence du Haut-Vallespir…
Cap Catalogne : C’est assez inattendu, cette station thermale, ce hameau, ces hôtels au bout extrême de la vallée. On peut dire qu’ici finit ou commence le Haut-Vallespir, selon la perspective choisie. Parlez-nous de ce lieu…
Alexandra Ramoneda : La station de La Preste est blottie au cœur des montagnes, à deux pas de la frontière et elle a donné naissance à un petit hameau situé un peu plus bas, plus près du Tech. C’est un peu comme si l’établissement thermal marquait le début d’une ascension, ou du moins en indiquait le chemin. Lorsqu’on se trouve ici, on a l’impression de pouvoir littéralement toucher le sommet des montagnes, d’entretenir avec elles une intimité mystérieuse, de les tutoyer. Elles semblent inviter le visiteur à les gravir, à les défier. La Preste est née de ces montagnes, car ses eaux bienfaisantes en jaillissent. C’est un diptyque indissociable. Ici, tout naît de la roche, et pourtant cette minéralité est adoucie par un écrin de verdure. C’est un lieu qui ne laisse pas indifférent, qui interpelle.
CC : Qui vient faire sa cure à la Preste ? Eu égard à la spécificité des eaux, vous devez avoir un public de fidèles ?
AR : Les curistes viennent de toute la France pour des cures conventionnées. Ce sont majoritairement des personnes d’une soixantaine d’années, dont plus de 70 % reviennent avec une grande fidélité, souvent chaque année. Nos eaux sont uniques. Elles sont réputées depuis plus de sept siècles pour leurs effets bénéfiques sur les infections urinaires et prostatiques, les lithiases, le métabolisme et les pathologies rhumatologiques. Les patients y trouvent une amélioration durable et un maintien de leur capital santé, tout autant qu’un excellent remède contre le stress. Beaucoup sont devenus, au fil des ans, des inconditionnels de La Preste, d’autant plus que les prestations proposées par la Chaîne Thermale du Soleil sont de tout premier ordre.
CC : La Preste est au cœur d’un cirque de montagnes fabuleux. Que pensez-vous de l’alliance tourisme vert et bleu ?
AR : Lorsqu’on arrive dans un cadre aussi somptueux, avec une faune et une flore uniques, des tapis de champignons et de fleurs, des sentiers escarpés qui longent ou surplombent des ruisseaux, il est évident que, si l’on est en condition physique suffisante, bien sûr, on s’empresse de profiter de cette nature généreuse. Elle constitue, au même titre que les eaux thermales, un attrait puissant. Je crois véritablement à l’alliance de ces deux formes de tourisme, auxquelles notre vallée semble naturellement destinée.
CC : Avez-vous noté un surcroît de notoriété de la station depuis l’obtention du label Unesco pour les Fêtes de l’Ours ?
AR : C’est difficile à quantifier mais il est certain que la notoriété de Prats-de-Mollo-La Preste est en pleine expansion et que le bouche à oreille fonctionne bien, même si, pendant les Fêtes de l’Ours, la station thermale est en pause hivernale.
CC : D’une façon générale, quelle est la proportion de curistes qui logent dans le village de Prats ?
AR : Environ 30 % de nos curistes sont hébergés sur place, ici, dans les établissements de La Preste, qui disposent d’une capacité d’accueil d’environ 80 chambres. Ils y trouvent sans doute le confort d’une parenthèse, ainsi qu’un certain goût pour la contemplation. Les autres séjournent bien sûr à Prats, dont nous ne sommes séparés que par sept petits kilomètres. Ils profitent de la beauté exceptionnelle du village, classé parmi « Les Plus Beaux Villages de France », de ses commerces, de sa capacité d’hébergement très variée, et surtout de son authenticité festive, frappée au sceau de l’hospitalité. Prats et La Preste sont indissociables, ne serait-ce que parce qu’il faut traverser le village pour venir jusqu’à nous !
CC : Vous avez développé une activité de spa. Arrive-t-il que des Catalans du sud en profitent ?
AR : Cela reste encore marginal, entre 4 et 5 % de notre clientèle curiste, mais cela représente justement un fort potentiel de développement. C’est un chantier ouvert. Nous avons entamé des campagnes de communication, et nous allons les poursuivre, notamment en direction de Camprodon, le jumeau de Prats, situé de l’autre côté du col d’Ares. C’est un beau défi, presque imposé par notre position géographique.
CC : Si vous deviez définir le Haut-Vallespir en trois mots quels seraient-ils ?
AR : C’est une question difficile, mais je me lance. En premier, je dirais : « Grandiose ». En second : « Apaisant ». Et enfin : « Naturellement riche ». Le Haut-Vallespir, c’est avant tout le règne de la nature, je crois. Nos paysages sont magnifiques.
CC : Justement, que pensez-vous que les gens viennent chercher chez nous en premier lieu, indépendamment des eaux ?
AR : Outre la beauté des paysages, que je viens d’évoquer, je dirais : la déconnexion. Je pense que tout ici invite à se retirer des rumeurs du monde, à la fois physiquement – en s’immergeant dans le vert et le bleu – et aussi spirituellement : la montagne, c’est la verticalité, la force indomptable. Il y a quelque chose de tellurique dans la puissance de nos sommets. Le Haut-Vallespir est un haut lieu de retraite, de retour sur soi, et peut-être plus que tout, d’apaisement. Bien sûr, je ne fais pas l’impasse sur l’intérêt touristique et patrimonial : tout est lié. Lorsque nous offrons notre verre de bienvenue aux curistes, nous veillons à leur signaler tous les points d’intérêt : Prats-de-Mollo, évidemment, mais aussi l’abbaye d’Arles-sur-Tech, les Tissages Catalans de Saint-Laurent-de-Cerdans, le Centre d’Interprétation de la Verneda, ainsi que les expositions et spectacles organisés à Fort Lagarde. Ici, ils trouvent les plaisirs du divertissement, la gastronomie montagnarde, le dépaysement transfrontalier et un patrimoine remarquable. Nos merveilleuses eaux disposent d’un écrin à leur hauteur !
CC : Quel est votre endroit préféré dans notre belle vallée, et pourquoi ?
AR : Sans hésiter, le Costabonne. Lorsqu’on a contemplé ne serait-ce qu’une fois dans sa vie la vue extraordinaire qu’il offre sur le cirque de montagnes, lorsqu’on a senti ses flancs porter nos eaux chaudes et vu naître le Tech, on n’a qu’une envie : y retourner. Le Costabonne, c’est un peu le seigneur de la vallée. Attention, c’est un site qui se mérite et qui impose un certain dépassement de soi. Mais c’est un endroit unique.
CC : Dans vingt ans, comment voyez-vous l’avenir ?
AR : Le thermalisme évoluera certainement. Ira-t-on vers des séjours fractionnés, des cures plus courtes, des remboursements plus limités ? Je ne saurais le dire. Ce qui est certain, c’est que l’unicité des eaux de La Preste n’est plus à démontrer. Je pense donc qu’à l’horizon de vingt ans, l’activité de la station aura augmenté, tout comme sa notoriété. Par ailleurs, je crois beaucoup au potentiel de l’alliance vert-bleu. Il est probable que l’on aille vers des séjours « à la carte » incluant soins, divertissements, et activités de pleine nature, qu’elles soient actives comme la randonnée, ou plus contemplatives comme les bains de forêt. Je suis convaincue que, comme cela a toujours été le cas au fil de ces sept siècles d’exploitation de nos eaux – à bien des titres légendaires – nous saurons nous réinventer.
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