
01 Août Toujours plus haut !
Avant tout, le Haut-Vallespir est une terre de montagnes. Il s’élève de 230 mètres à Palalda, jusqu’aux sommets du Col d’Ares à plus de 1 500 mètres d’altitude, en passant par la Réserve Naturelle de Prats-de-Mollo-La Preste et son refuge de Les Conques.
Toutes les activités humaines de la vallée ont pour témoins silencieux des pics dressés : certains jouent un faux rôle de frontière de crête et relient Amélie à Maçanet, Saint-Laurent à Tàpies, Prats à Molló. D’autres, comme le Très Vents, œuvrent au cœur du Canigou et séparent Vallespir et Conflent. Creusés de rivières et de ruisseaux, ornés de collines et de pitons rocheux, ces reliefs composent un fantastique terrain de jeu pour tous ceux qui aiment les grands espaces : défis personnels, randonnées en famille ou entre amis, immersion pure dans la nature. Prompte à guetter les vents propices, la vallée a su saisir ce nouvel axe de développement en balisant des centaines de kilomètres de sentiers que les chasseurs entretiennent à longueur d’année, en investissant dans le refuge de Saint Guillem de Combret, tout près de Montferrer et du Tech, en créant une belle piste cyclable située sur l’axe Pyrenexus, qui permet de rallier Girona via le Perthus ou Camprodon.
Les sommets du corps et de l’esprit
Les plus aguerris préfèrent la route en lacets qui mène à Coustouges depuis Maçanet. Ces paysages spectaculaires ont vu naître de grandes épreuves sportives, telles que le Bearman, dont le champion réside à Palalda, la Skyrace, une course vertigineuse sur les crêtes ou encore le Kilomètre vertical, au départ d’Arles-sur-Tech. Les villes d’Amélie-les-Bains et de Gruissan participent l’une et l’autre au Rando Festival à la fois culturel, sensoriel et sportif, qui vient de fêter sa septième année et attire un nombre croissant de fidèles. Encadrés par la marque Rossignol, de nombreux adeptes s’initient à la marche nordique ou à la marche afghane, munis de bâtons adaptés. Le mouvement en pleine nature, les bains de forêt et les immersions en rivière s’inscrivent désormais dans un véritable art de vivre, auquel s’ajoute, en parallèle, l’expérience apaisante des eaux thermales, proposées dans des versions innovantes à Amélie-les-Bains comme à La Preste. Côté détente, le Haut-Vallespir s’est doté d’un golf d’altitude au parcours particulièrement somptueux, autrefois niché dans les bouquets de fougères, comme son nom l’indique « Falgos ». On y contemple non seulement le Canigou et la chaîne des Pyrénées, mais aussi la tache bleu turquoise de l’une des plus belles baies du monde : la baie de Roses. L’air iodé porte des parfums de fleurs et brumise les cimes écrasées de soleil. Un petit paradis. Sur les cours d’eau, le canyoning et parfois le rafting battent leur plein tandis que les falaises accueillent des bouquets de grimpeurs en quête d’émotions fortes et de panoramas à couper le souffle.
L’âme pure des montagnes
Partout, les sentiers empruntés autrefois par les muletiers, soldats, mineurs ou fugitifs s’ouvrent aujourd’hui à des escapades inoubliables. Elles mènent à la découverte de petits ermitages perdus, comme celui du Coral, entre Prats et Lamanère, ou la minuscule chapelle de Santa Engràcia à Amélie, l’ancien hospice Sainte Marguerite au-dessous du col d’Ares, mais aussi de grands mas de pierre surplombant d’anciennes terrasses en pierres sèches. Il n’est pas rare que vous y attende une grande vasque de pierre où coule une eau glacée. Inspiré par tant d’élévation naturelle, l’homme voulu doter cette vallée d’actions de grâce minérales, de chefs d’œuvre architecturaux où la quête d’intimité romane, toute de modestie et de pentures travaillées, s’illumine de fabuleux retables baroques, souvent dus au ciseau de la dynastie Sunyer. Palalda garde encore, enserrées dans ses rues pentues l’église Saint Martin (Xe siècle) et le trésor gothique de son église du Rosaire, blottie dans ses jardins. à Montalba, le tout petit temple recèle des merveilles d’art baroque naïf que n’admirent plus guère, hélas, que les familles de chauve-souris qui y ont élu domicile. La vierge romane de la nouvelle église d’Amélie, Saint Quentin (200 ans déjà, tout de même !) vous surprendra, installée au beau milieu d’un chœur immaculé qui n’a rien à voir avec les constructions romanes. Amélie regorge de belles villas de villégiatures qui sont un véritable répertoire de styles régionaux, coloniaux, ou nationaux. À noter : le petit temple protestant dû à Viggo Dorph-Petersen, l’architecte du Parc Ducup, du Château d’Aubiry ou du château de Valmy et l’ombre tapie de Fort les Bains, sur la colline. Bien sûr, l’église de Montbolo avec son beau portail latéral, ou celle de Montferrer méritent le détour dans leur frugalité grandiose. à Corsavy, le travail patient et obstiné d’une vie dédiée à Dieu et à la Catalogne a redonné vie à l’église Saint Martin, une renaissance émouvante effectuée avec les outils et le temps des maîtres opératifs.
Terroirs vivants, traditions vivaces
Un lieu unique, habité, propice au recueillement le plus profond. Pourtant, rien dans la vallée n’égale la splendeur romane de Sainte Marie d’Arles : l’élan incroyablement nu, vertical, de ses voûtes, la gloire colorée de ses peintures d’époque, retrouvées par hasard derrière son grand orgue, la grâce de son cloître gothique arachnéen qui s’ouvre entre les maisons ou encore le mystère de son sarcophage qui semble se remplir d’une eau que l’on dit miraculeuse. Il s’agit tout simplement de la plus ancienne abbaye carolingienne de Catalogne, l’égale de Saint Michel de Cuxa ou de Sant Joan de les Abadesses ! Un haut lieu de foi et de patrimoine. La cité médiévale d’Arles, tout autour, a conservé un caractère farouche et singulier, ainsi que de très belles maisons de maître de style art nouveau ou moderniste. à Serralongue, vous attend la surprise païenne du Conjurador, cette tour où le prêtre venait autrefois conjurer les tempêtes et les orages. Insolite et magnifique ! En 1940, la Comelade en furie a emporté l’église du Tech : reconstruite sur la colline c’est une féérie florale aux vitraux ravissants et inattendus. Rien ne saurait pour autant vous préparer au choc que dispense Prats-de-Mollo : ses belles maisons de pierre blotties dans les remparts, son escalier monumental à la calade irrégulière qui mène à la magnifique église baroque Sainte Juste et Sainte Ruffine, baignée par l’or de ses retables, ni à son fort monumental accessible par un chemin couvert qui grimpe hardiment la colline. Prats est à juste titre reconnu comme « Plus beau village de France ». C’est un peu réducteur, c’est aussi l’un des plus beaux villages de Catalogne, partagé entre ville haute et ville basse, doté d’un splendide balcon sur le Tech – le Rincon – et d’une petite chapelle où trône une œuvre du peintre local au destin fabuleux, Jean Lareuse. Un peu partout, le petit patrimoine que sont les lavoirs et les fontaines apporte son lot d’authenticité rugueuse. L’éternité plane sur ces vallées tressées, portée par le vol lent et majestueux des aigles, qui quittent la tour du Mir pour celle de Parella, s’arrêtent près des tours de Cabrenç, repartent vers la tour de Batère, attachés à prendre la mesure de ce petit pays sauvage dont l’âme, jamais, ne se laisse dompter.
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