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GIRONA : LAISSEZ LE CHARME AGIR

01 Fév GIRONA : LAISSEZ LE CHARME AGIR

Toutes les fées se sont penchées sur le berceau de Girona pour mêler à ses sardanes un écho de tarentelle. Visite d’une belle Catalane qui rêve d’Italie.

Lorsqu’ on arrive à Girona, on est immédiatement happé par la hauteur insolite de la cathédrale et les dimensions de son fronton baroque qui se découpe au-dessus du quartier ancien. En contrebas, la silhouette de plusieurs clochers, des ruelles qui semblent se jeter dans le vide, étroites, et juste devant nous, sur l’autre rive de l’Onyar, de l’autre côté des passerelles, une image florentine : des maisons aux belles teintes pastel dont les balcons fermés de vérandas s’élancent en encorbellement au-dessus de la rivière.

La colline inspirée

Girona, l’ancienne Gerunda des Romains, est construite sur une acropole, protégée par ses remparts et ses tours rondes, encore partiellement intactes. Autour de ce noyau, la ville s’est structurée, ponctuée de bâtiments religieux et civils de toute beauté, surmontée par des jardins odorants. Girona ne laisse aucun visiteur intact. La colline enchantée surmontée de la cathédrale est un véritable musée à ciel ouvert, avec l’église de Sant Pere de Galligants, un des plus beaux ensembles romans de Catalogne, dont le plan basilical abrite le musée d’art roman. La basilique Sant Feliu, première église de Girona, allie une belle nef gothique à un chevet roman, une très belle façade baroque et un mobilier remarquable, comportant huit sarcophages païens et paléochrétiens, et un magnifique Christ gisant. Au rayon des curiosités, l’église de Sant Martí, sa façade baroque et l’étrange escalier dont l’arche s’ouvre en biais sur le Palau Agullana fascine toujours des nuées de photographes. Juste une mise en bouche avant le choc de la cathédrale avec sa colossale escalinata qui épouse la courbe abrupte de la montagne et sa nef gothique réputée la plus grande d’Europe. Elle conserve en outre la tour de Charlemagne et un petit cloître-bijou d’une grande beauté. En contrebas, sur la droite, s’élèvent des « bains arabes » d’inspiration byzantine, créés au XIIe siècle quand les croisades attiraient en Orient la fine fleur de la noblesse, qui présentent une jolie piscine surmontée d’une sorte de dais de pierre octogonal, porté par de fines colonnes de marbre. Tout autour des sortes de banquettes de pierre invitent au repos. Jusqu’au XVe siècle, date d’éviction par les rois catholiques des juifs du Call de Girona, les fenêtres des maisons ne s’ouvraient pas sur la rue, mais sur les jardins, derrière, car le quartier était fermé pour que Juifs et Gentils ne se mélangent pas.

Toutes les mémoires

Patiemment restauré au début de la transition démocratique dans les années 1980, il est devenu l’un des fers de lance touristiques de la ville à laquelle il restitue sa riche mémoire juive à travers un petit musée passionnant, situé dans une vieille maison, à deux pas de la cathédrale. Le patio sur l’arrière, littéralement adossé à la roche, est un petit havre de poésie et la librairie, une véritable mine, malgré ses airs de petit capharnaüm ! Toutes ces constructions médiévales ou renaissantes dont une grande partie subsiste correspondent aux nouveaux remparts construits entre le XIe et le XVe pour doubler les anciennes murailles romaines. Ne vous privez surtout pas de parcourir les chemins de ronde les plus longs d’Europe ! Ils vous offriront une vue incroyable sur la vieille ville et plus loin, sur les collines alentour. Au gré des rues pentues, vous croiserez la faculté de Lettres qui garde la façade de l’ancienne université et occupe l’ancien couvent Sant Domenec et son cloître. Ici le patrimoine ne se contente pas d’être admiré, il est habité et vivant ! En bas de la colline, au bord du fleuve, s’étend la Rambla de la Llibertat, haut lieu de sociabilité avec ses nombreux restaurants, ses voûtes basses qui remontent au XIIIe siècle et ses maisons modernistes comme la Casa Norat (1912). Les rues adjacentes s’ornent parfois de fontaines, partout des boutiques d’artisanat, des cafés accueillants où des jeunes jouent aux cartes, des boutiques aux enseignes anciennes et des placettes minuscules. Sur la rambla, on note trois chapiteaux représentant un homme escargot, un musicien portant un sac de gemecs et un personnage barbu avec des ailes. Un peu plus loin, la place du vin s’ourle de galeries voûtées : c’est la place de la mairie, un joli hôtel particulier. De l’autre côté du fleuve commence une autre Girona, plus moderne, qui réserve de belles surprises architecturales et notamment, un très beau patrimoine moderniste autour des figures de Rafael Masó, d’Isidre Bosch i Bataller, de Joan Roca Penet, de Josep Martí Burch ou d’Enric Català et Català : un véritable lexique du grand mouvement esthétique catalan ! Mais Girona est aussi un incroyable cadre naturel. D’abord, elle est traversée par trois rivières et un canal d’irrigation. Volontiers brumeuse, la ville possède un immense espace vert en bordure de Ter, planté de peupliers, qui accueille les promenades, des spectacles dans son pavillon, des piscines éphémères l’été… Un espace magnifique, peuplé d’oiseaux, de poissons, de batraciens, d’une belle végétation aquatique et riche de prés ouverts. Une rue à traverser et on se trouve sur une jolie place carrée, elle aussi entourée de galeries voûtées où se sont étalées à l’envi les terrasses de restaurants : la place de l’indépendance.

Quel rythme !

D’ailleurs, la nuit peut bien venir, c’est à peine si la ville ralentit ! Un cocktail au Nykteri, une bonne rumba au Lola Café, Girona, c’est ce mélange d’activité trépidante, de convivialité et cette omniprésence du beau qui tresse étroitement moderne et ancien, jours clairs et nuits blanches comme si Rome et Florence s’étaient trouvé une petite sœur commune qui invite à vivre. Intensément.

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