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La Llagonne, Hors des sentiers battus !

03 Fév La Llagonne, Hors des sentiers battus !

La toute petite Quillane est quinqua ! Et ça se fête. Sa mère, la Llagonne, peut être fière. Parce qu’ici, sur le plateau du Capcir, c’est « l’esprit famille » qui règne. Plusieurs générations d’enfants ont appris à skier ici. Les parents eux, ne jurent que par la douce et paisible Llagonne. Un village à qui la vie a laissé la chance de rester lui-même. à peine 200 habitants, mais la belle âme d’une vieille dame aux mille histoires contées a « la vora del foc » (au coin d’un feu) qui toujours crépite. 

La Quillane est quinqua ! Elle, la « petitoune », celle qui depuis un demi-siècle s’invite tous les ans en hiver dans les journaux télévisés pour revendiquer son statut insolite de « plus petite station de ski des Pyrénées ». Qu’on se le dise, non seulement la Quillane n’a pas pris une ride mais surtout elle a su garder son charme et son authenticité. Seulement quatre pistes dont trois vertes et une bleue. Pas de quoi rivaliser avec l’arc en ciel côté couleurs, mais le cœur y est ! Il suffit de jeter un œil au nom des pistes et tout est dit. Ici, on dévale sur la Jules et la Laurent, la Margaux et la Charlotte. Bienvenue chez la famille Balaguer ! Et comme toutes les belles aventures, tout commence par une histoire d’amour entre Ginette et Laurent. Enfants d’agriculteurs de Sauto et de Rieutort, les amoureux ne quitteront jamais les hauts plateaux. Ginette la postière de Formiguères puis de la Llagonne est connue comme le loup blanc. Laurent, amoureux de son environnement, devient exploitant forestier. Il sera un temps perchman à Font-Romeu et se spécialise dans la mise en tension des câbles. Il n’en faut pas plus pour se lancer dans la grande aventure. 

Saga familiale sur trois générations 

En 1971, Laurent installe le premier téléski sur la commune de la Llagonne. Un second appareil suivra en 1972. Un fil-neige et un télékit s’inscrivent sur les pistes en 1990. Le couple Balaguer n’a pas oublié de passer le relais. De leurs deux fils, c’est Jean-Claude qui prend la tête de la station : «  Si la Quillane est connue pour être une station familiale, c’est certainement parce qu’elle est portée par une solide histoire de famille ! Notre père est décédé en 2015 mais notre mère Ginette a 83 ans et veille toujours au grain. Elle habite au pied des pistes ! Et mon frère Charles n’est pas très loin puisqu’il est directeur du parc animalier des Angles et qu’il garde toujours un œil sur la station ! » Les Balaguer toujours à l’affût, par amour pour « leur » station. Aujourd’hui, au-delà de son rôle de directeur Jean-Claude est moniteur, pisteur, chauffeur-dameur et toujours grand rêveur pour son plus grand bonheur ! « Je gère la station comme je veux ! C’est un luxe absolu. Je connais chaque arbre et le moindre recoin de la station. » Exploitant forestier lorsque la station est fermée, Jean-Claude porte cette fierté de bûcheron à cœur et à corps. Résistance, robustesse et goût prononcé pour les valeurs inscrites dans l’ADN familial. Dans la lignée Balaguer, les trois générations sont encore et toujours à pied d’œuvre pour leur Quillane. C’est au Restaurant de la Quillane, en pied de piste que transpire cet « esprit famille » qui fait la force de la station. Bois du sol au plafond, vrai feu de cheminée et comptoir à palabres. Dans un coin, un piano tutoie les pistes par la grande fenêtre. Partition parfaite pour une atmosphère aux antipodes des stations qui ont choisi d’ouvrir la porte au tourisme de masse. Ici, le forfait est remis en main propre. On revient chaque hiver ouvrir la boîte à souvenirs des premières glissades. 

Terrain de jeu des frères Fourcade !

Nostalgie à flocons ! Même les chiens Terre Neuve de la famille Balaguer gardent le même nom depuis 50 ans. Ils s’appellent tous « Plouf » ! Une fois tombées dans la marmite de la Quillane, les familles l’avouent : « C’est comme ça, c’est une religion : on vient apprendre à skier à la Quillane de génération en génération. Et quand on veut s’offrir une descente tranquille sans faire la queue avec un super paysage à la clé, c’est ici qu’on revient toujours ! » Il faut dire que la commune de la Llagonne a largement fait parler d’elle depuis une quinzaine d’années grâce aux frères biathlètes professionnels Simon et Martin Fourcade. Enfant de la Llagonne, fils de l’ancien maire du village, Martin surnommé « l’Ogre Catalan » est quintuple champion olympique, sept fois vainqueur du classement général de la Coupe du Monde et treize fois champion olympique ! Et c’est ici qu’il a découvert les joies de la glisse ! Pour la saison 2022-2023, la station est fière d’accueillir Brice, le troisième frère Fourcade en tant que responsable de l’école de ski de la Quillane, moniteur ESF et initiateur au Freestyle. Comment la Llagonne et la Quillane ont-elles réussi à conserver leur identité sans céder aux sirènes de l’uniformisation ? Une fois n’est pas coutume, convoquons l’illustre ingénieur architecte Sébastien Vauban qui en 1679 est appelé par Louis XIV pour construire la citadelle de Mont-Louis. Durant les deux années de construction de cette place forte, Vauban prend la température du paysage dans lequel s’inscrira son œuvre. C’est en ces termes que cet illustre personnage aura été interpellé par la Llagonne et ses habitants : « On y jouit d’un air un peu froid à la vérité, mais si sain que les habitants m’ont dit y vivre 80 ou 90 et parfois jusqu’à 100 ans. Les hommes y sont très bien proportionnés dans leur taille, et tous ont les jambes bien faites, les dents blanches, les yeux vifs, de l’esprit et entendent à demi-mot ce qu’on veut leur dire, au surplus un peu pendarts et gens à escoupeter leurs ennemis sans beaucoup de façon. » Un drôle et singulier portrait-type du Llagonnais qui, à y regarder de plus près n’a finalement que peu perdu de son franc-parler, de son caractère et de son aplomb. Il suffit de passer une journée au bord de l’étang en bas de pistes avec Ginette Balaguer pour vérifier que les Llagonnais ne s’en laissent pas conter ! Si dans le village, vous vous perdez dans l’entrelac de ruelles, il est quasi garanti que « la vigie » Marie-Jeanne Bernole, mémoire vivante d’un village de montagne au grand cœur, vous remette dans le droit chemin. Ici, au pays des Bernole et des Corrieu, tout le monde se connaît. Un seul commerce pour se retrouver : le point presse qui fait office de dépôt de pain, de tabac, d’alimentation, de quincaillerie, de droguerie… à la manière de ces bulles d’antan où le temps prend plaisir à s’arrêter. Un restaurant et une nouvelle fois, pas des moindres : la Table du Capil (hébergée dans l’historique Hôtel Corrieu). Aux fourneaux, le chef Fabrice Dubos entré tout jeune dans la grande brigade parisienne du chef Joël Renty au Concorde Lafayette. Après des passages au Taillevent, à la Tour d’Argent et au Jasmin de Joël Robuchon, il fait l’ouverture du Sofitel du Château de Versailles en qualité de chef de cuisine. Le chef Dubos passera par le Café Faubourg auprès d’Alain Dutournier, puis du Pinxo, avant de s’installer à la Llagonne en 2016. Aujourd’hui, disciple d’Escoffier, membre des Toques Blanches du Roussillon, Fabrice Dubos a hissé la Table du Capil dans la liste des restaurants recommandés par le Michelin et le Gault et Millau. Parmi les plats signatures : le pâté en croute de canard au foie gras, le carpaccio de pieds de cochon aux moutardes de Saillagouse, la poitrine de porc croustillante et fondante au miel (cuisson pendant 19 heures à basse température), le mœlleux au chocolat noir et au piment d’espelette, le sorbet cacao maison… Halte incontournable et menu irrésistible. Entre simplicité et hospitalité, la Llagonne a l’art et la manière de tracer sa voie et sa voix… En 2022, le fromager Jean Palau aura grâce à son talent de chanteur, mis la Llagonne sous le feu des projecteurs de l’émission The Voice. Avec son mari Denis Corrieu, Jean dirige depuis 2011 la ferme du Rialet sur la commune. Trois cents animaux plus tard, dont 30 vaches et 50 chèvres, le fromage à raclette et les yaourts à la châtaigne jouissent d’une incroyable réputation. Le conte de fée se poursuit pour le fromager-chanteur qui vient de sortir son premier single : une reprise de « La Montagne » de Jean Ferrat. Et pourtant que la Llagonne est belle ! 

1Commentaire
  • Daniel G
    Posted at 22:44h, 04 février Répondre

    Souvenirs inoubliables avec la famille Balaguer que nous n oublierons jamais !

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