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Rencontre avec Nicole Gonzalez

02 Juin Rencontre avec Nicole Gonzalez

Nicole Gonzalez est la présidente de l’Office de Tourisme Intercommunal Aspres-Thuir. Elle a longtemps été élue à la culture auprès du maire de la capitale des Aspres, René Olive. Cette amoureuse de son territoire ne ménage pas sa peine pour en faire une destination touristique prisée en toutes saisons.

Cap Catalogne : Bonjour Nicole Gonzalez, vous êtes Présidente de l’Office de Tourisme de Thuir et des Aspres.

Nicole Gonzalez : C’est beaucoup d’investissement pour un territoire somme toute difficile, si l’on considère son extension et ses contrastes…

CC : Les Aspres vous paraissent mal connus ?

NG : En tout cas, pas assez. Il y a déjà un flottement au niveau des limites réelles. Bien sûr il y a notre communauté de communes, mais la sous-comarque historique n’y correspond pas tout à fait. Et puis, on ne traverse pas les Aspres pour se rendre quelque part, sauf si on a décidé de s’attarder et de musarder dans les sous-bois, c’est un monde assez clos, au fond, dans sa partie montagneuse. C’est tout son charme. Beaucoup de gens ne connaissent que Thuir, finalement.

CC : Pourtant les distances ne sont pas énormes…

NG : Non, disons que passer par le cœur des Aspres rajoute au maximum vingt minutes de trajet, mais vingt minutes de beauté pure. C’est un territoire fait pour être traversé depuis la nuit des temps ! Avec une offre très diversifiée au niveau du patrimoine, des paysages, des altitudes.

CC : Vous voulez dire que cela impose de trouver des cohérences touristiques, de définir des priorités dans l’approche ?

NG : C’est vrai, c’est un territoire très vaste et très varié qui impose de structurer l’approche, il ne faut pas se disperser. Le premier étage de la fusée, ou plutôt la locomotive absolue pour passer à une économie touristique du XXIe siècle, ce sont les caves Byrrh. Je suis fermement convaincue que l’essentiel est d’identifier un territoire, de le différencier des autres. Indéniablement, l’épopée du Byrrh, c’est ici et nulle part ailleurs, et c’est une épopée assez proche dans le temps pour avoir encore un écho dans la mémoire collective. Nous bénéficions par rebond de l’incroyable renommée de notre apéritif comme si à des décennies de distance, il continuait de veiller sur nous !

CC : J’imagine que créer un lieu de visite n’a pas été une mince affaire, d’autant qu’une partie des établissements est encore en activité ?

NG : Ce fut un travail de très longue haleine. Il a fallu réhabiliter, faire connaître, et surtout, proposer une offre en mouvement. Le public ne se contente plus d’une offre statique, nous sommes dans une époque de zapping, et de multiplicité des informations. Le public a besoin de nouveauté, d’accompagnement. Nous avons créé des audiovisuels sur-mesure, avec des comédiens d’ici pour retracer l’épopée de la création du Byrrh, une exposition d’affiches confiées par la famille Violet aux plus grands designers de la Belle époque pour faire la publicité de notre apéritif, du mapping et des visites théâtralisées. En parallèle, les enfants ont bénéficié de visites en costumes d’époque, nous avons ouvert des ateliers cocktails, puis nous allons ouvrir en juin, en collaboration avec les Toques Blanches, des ateliers cuisine avec des recettes basées sur les produits locaux.

CC : Toujours autour du Byrrh ?

NG : Oui, c’est un peu notre potion magique ! Et évidemment ce n’est pas fini, nous pensons déjà à des visites en musique pour 2018 ! Soulignons aussi que les visites nocturnes ont eu un succès fou, notamment familial ! Inutile de vous dire que tout ça fait tourner l’économie locale, qu’il s’agisse des commerces ou des restaurants !

CC : C’est un gros travail culturel, aussi, avec une grosse implication des talents locaux et justement, le parti pris de les utiliser en priorité.

NG : Nous avons beaucoup d’artistes, ne pas faire appel à eux serait un contresens total. Heureusement, nous sommes une équipe, Alix Bourrat, qui s’occupe de la culture pour la municipalité, est une aide précieuse, notamment au niveau du Théâtre des Aspres. En tout cas, au bout de trois ans et demi d’exploitation, je suis heureuse de constater que la mayonnaise prend. Nous avons enregistré cette année 20 % de visiteurs supplémentaires et le chiffre d’affaires a grimpé de 25 %. Autant dire que cela signifie d’énormes retombées pour la ville de Thuir, qui gagne en notoriété et pour son arrière-pays…

CC : Comment expliquez-vous un tel engouement ?

NG : D’abord, les gens aiment l’authentique, ils ont la nostalgie de ces époques bénies où les success stories étaient possibles, où le travail donnait de la dignité. Le terroir, c’est important, ce sont les racines, tout le monde s’y retrouve, c’est un vrai marché aux souvenirs d’enfance d’où que l’on soit. Et puis, l’imaginaire du Byrrh, je veux dire esthétique, c’est aussi à la fois l’art-déco et la Belle époque, tout ça séduit la presse nationale et internationale. Quand Jean-Luc Petitrenaud, chroniqueur gastronomique radio et télévision, nous a consacré un sujet, la fréquentation a bondi !

CC : J’imagine que ce beau succès se traduit par des emplois ?

NG : Bien sûr, entre mai et octobre nous sommes 22 et le reste de l’année, nous avons quand même une équipe de 10. Ce n’est pas rien… La boutique fonctionne tellement bien que la ville vient de racheter une maison voisine pour pouvoir l’agrandir… Nous communiquons en six langues, qui correspondent au profil de nos visiteurs, vraiment tous les voyants sont au vert.

CC : Et donc, la locomotive que sont les caves, tire un territoire aussi vaste que varié…

NG : Oui, les Aspres, c’est un monde d’habitat dispersé, un monde dans lequel il faut proposer des routes à parcourir en voiture ou en vélo électrique, un monde sillonné de sentiers de randonnée. Comme nous avons constaté un déficit en termes de restaurants, nous sommes en train de créer un réseau de bistrots de terroir pour encourager les visiteurs à passer la journée tout entière chez nous, en s’offrant une halte conviviale et gastronomique autour de nos produits. à partir des caves Byrrh et du château de Castelnou, nous pouvons déployer une offre plus large.

CC : L’hébergement, ce sont des gîtes ruraux ?

NG : Oui, nous en comptons un certain nombre, et beaucoup méritent vraiment le qualificatif de gîtes de charme. Pouvoir fidéliser les visiteurs sur de courts séjours est essentiel.

CC : Dans les Aspres les entrées sont multiples du patrimoine religieux au patrimoine industriel…

NG : évidemment, il y a le château de Castelnou, un incontournable. Là aussi, lorsque Stéphane Bern lui a consacré un sujet, la fréquentation a explosé. Mais songez que nous avons l’église de la Trinité et donc, un des plus beaux Christ en majesté du monde, le prieuré de Serrabonne avec sa tribune de marbre rose de Villefranche, la jolie chapelle et le cloître miniature de Monastir del Camp ou encore l’ermitage de Saint Ferréol. Une série de chefs-d’œuvre. Le paysage nous dicte les axes à développer, d’une certaine façon il définit son propre avenir… Les chênes lièges parlent de l’industrie des bouchons, si importante autrefois, les mines racontent le dur labeur des ouvriers du fer, ce sont autant de routes à proposer aux visiteurs.

CC : On vous sent habitée par les Aspres…

NG : Le pluriel a ici tout son sens. Tout l’enjeu de notre mission consiste à faire ressentir aux visiteurs la profonde cohérence des Aspres, malgré leur diversité de reliefs, de végétation, d’habitat. à leur faire aimer nos villages perchés qui regardent la mer, nos fontaines, notre histoire forgée par les Templiers, les Rois de Majorque et d’Aragon, et tous ces gens qui ont sillonné des siècles durant nos montagnes, muletiers, pèlerins, mineurs, bergers, bûcherons…

CC : Et vos vins…

NG : Pas seulement. Nous avons à cœur de défendre tout ce qui sort de ce terroir : artistes, vins, produits maraîchers, artisans d’art. Parce que c’est toujours l’humain que nous plaçons au centre de tout dispositif. Les Aspres, c’est d’abord et avant tout la douceur de vivre, et oui, j’ai à cœur de la faire partager !

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