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TARRACO, VILLE ROMAINE

30 Mar TARRACO, VILLE ROMAINE

La quasi-totalité du patrimoine romain de Tarragone et de ses alentours est si remarquable, si incroyable même, qu’il a été classé sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco en 2000. La capitale de la Costa Daurada présente en effet l’étendue de ruines romaines la plus importante d’Europe après la capitale de l’Empire, Rome. Ce fait souvent méconnu en fait une sorte d’énorme et inépuisable musée à ciel ouvert en plein cœur de la ville, avec en prime, la Méditerranée. Les quatorze monuments retenus pour le classement sont, ensemble et séparément, d’une importance capitale pour l’histoire du développement de l’urbanisme occidental car Tarraco a finalement servi de modèle à nombre de grandes capitales du monde !

Une fondation militaire

Tout a commencé en 218 avant JC, quand les Romains ont installé sur place un avant-poste à partir duquel ils sont partis à la conquête de la péninsule ibérique occupée par des tribus ibères. Tarraco est alors la toute première fondation militaire des Romains hors de l’actuelle Italie. Très vite, la ville s’agrandit au point de devenir la capitale de l’Hispania Citerior, visitée par les plus grands dignitaires et même par des empereurs dont certains vont même jusqu’à s’y installer un temps. Elle est idéalement placée sur la Via Augusta, l’autoroute de l’époque, et dispose d’un port important qui importe et exporte artisanat, vins, marbres ou encore huiles. Ses remparts, énormes, sont l’un des premiers exemples d’ingénierie militaire de la péninsule avec leurs 3 kilomètres de long, leurs 6 mètres de haut et leurs 4,5 mètres d’épaisseur. Une muraille formidable. Chose incroyable, les visiteurs peuvent encore faire en partie le tour des chemins de ronde comme si vingt deux siècles ne s’étaient pas écoulés ! Certains des bastions carrés qui les ponctuaient autrefois sont encore intacts. La tour de Minerve, par exemple, possède cinq têtes sculptées sur son mur extérieur dont un représentant la déesse.

Monuments au cœur de la ville moderne

Le Forum provincial construit sous Vespasien, en 73 après JC, a été utilisé jusqu’au Ve siècle avant que certains de ses édifices ne soient transformés en habitations privées. Ainsi son extension correspond-elle à peu près à la Tarragone médiévale. Ses murs sont encore visibles par endroits. L’espace était constitué par deux places respectivement réservées au culte et aux cérémonies, qui jouxtaient une sorte d’enceinte inférieure où se trouvait le cirque. L’enceinte la plus haute, siège du concile, était située dans la zone la plus élevée de la cité, aujourd’hui occupée par l’ensemble cathédral. Elle était entourée par un mur de 9 mètres de haut qui soutenait la couverture d’un portique avec des colonnes. C’est là que se trouvait le temple. Les deux places étaient reliées par un grand escalier. La plus grande mesurait 175 m de largeur sur 318 m de longueur, ce qui en fait la place la plus vaste jamais construite par l’Empire Romain. Trois de ses quatre côtés étaient délimités par un podium élevé couvert par un vaste portique qui s’appuyait sur un mur avec des pilastres (dont on peut encore voir de nombreux fragments dans la cité). Derrière ce portique s’élevait une large voûte, dont on conserve diverses travées, comme les voûtes dites del Pallol ou du Prétoire. Elle soutenait probablement une galerie supérieure. Aux angles méridionaux de la place se dressent encore les tours de l’Ancienne Audience et du Prétoire, qui étaient utilisées comme cage d’escaliers donnant accès depuis le niveau inférieur du cirque à la place et à la galerie supérieure. En contrebas, le cirque, qui date de 119 avant JC, est encore visible et étrangement incliné, comme couché sous les maisons. Il mesurait 325 m de longueur et 115 de largeur et pouvait accueillir 24 000 spectateurs qui assistaient à des courses de chevaux et de chars, un véritable hippodrome !

étendu aux alentours de la ville

Le théâtre de Tarragone, le seul de Catalogne, a été construit à l’époque d’Auguste à la fin du Ier siècle en profitant de la pente naturelle pour y créer des gradins où les gens s’installaient par ordre censitaire et social. Il en subsiste quelques traces. Le fait qu’il soit en quelque sorte doublé par l’amphithéâtre atteste l’importance acquise par l’antique Tarraco, car cet équipement à la fois sportif et culturel, destiné aux grandes réunions de masse et fédérateur de toutes les classes sociales, est venu enrichir une offre déjà nourrie, un privilège strictement réservé aux grandes villes de l’Empire. Pomponius Mela, le plus ancien géographe romain connu, ne disait-il pas que « Tarraco était la ville la plus opulente de toutes celles situées sur la côte » ? Autres curiosités, les trois aqueducs qui acheminaient l’eau des rivières Francoli et Gaià pour alimenter la ville, dont subsiste, parfaitement intact celui des Ferreres, un petit pont du Gard de 21m de long et 27 m de haut. Tout près de la ville s’élève aussi un étrange tombeau romain, une stèle sculptée en forme de tour, la tour des Scipion, du nom des frères Publius Cornelius Scipio et Gnaeus Cornelius Scipio Calvus à la tête de la toute première armée romaine étant intervenue sur le territoire. Un peu plus loin encore, l’Arc de Berà, un arc de triomphe construit par les Romains à la fin du premier siècle avant notre ère, orne un rond-point en plein milieu de la route. Tous ces monuments ont pu être bâtis en grande partie grâce à la pierre calcaire extraite de la carrière romaine de El Mèdol dont l’excavation mesure plus de 200 m sur 40 et atteint une profondeur de 12 mètres. En son centre subsiste encore la colonne témoin. Il faut encore mentionner, inscrites sur la liste de l’Unesco également, deux villas romaines, à savoir le magnifique ensemble monumental de Centcelles dont on suppose, étant donné sa magnificence, qu’il s’agit du mausolée de l’empereur Constantin, avec sa coupole et ses incroyables mosaïques, et enfin la Villa dels Munts, située à Altafulla. On y voit encore les citernes, les thermes, et une incroyable richesse dans la décoration de marbre et de mosaïque. Tarragone, c’est juste le voile du temps sur une ville antérieure bien présente encore : la Tarraco romaine.

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