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TORREDEMBARRA : LA CITE BLEU SOLEIL

09 Juil TORREDEMBARRA : LA CITE BLEU SOLEIL

Elle est château. Elle est plage. Torredembarra souffle une expérience à vivre à la puissance du soleil. Dorée par la Méditerranée, la cité se savoure en « goût nature ». Entre dunes et vieilles pierres, succombez au vertige de la simplicité.

Torredembarra, un nom à rallonge pour la belle allongée de la Costa Daurada. Collée à la mer, à 13 km de Tarragone et à moins de 100 km de Barcelone, Torredembarra cultive l’art et la manière de ne s’embarrasser de rien ! Une cité de moins de 18 000 habitants qui fait corps avec la nature. Voilà Torredembarra. Pas de luxe ostentatoire, pas d’entorses urbanistiques. S’offrir Torredembarra, c’est risquer de se faire prendre en délit de fuite. C’est se faire arrêter net par un tableau qui fera du visiteur un chasseur de lumières clandestines et d’histoires mystérieuses. Il suffit de s’attabler en front de mer pour se sentir rapidement « espionné » par l’habitante…Un regard faussement égaré, une oreille volontairement perdue entre deux tables. Torredembarra aime le murmure et la confidence. Entre les lignes d’horizon et l’onctuosité du sable matinal, Rosalia s’invite dans le tableau. Seulement un prénom et un sourire. Rien d’autre. En secret, le ton est donné. Car s’appeler Rosalia et habiter Torredembarra, c’est posséder le sésame suprême ! Rosalia n’est autre que la Sainte Patronne de la ville depuis 1640. C’est elle qui aurait sauvé Torredembarra de la peste. Enfin, pas vraiment elle, mais son tableau ! Une œuvre d’art représentant la Sainte Italienne était alors reléguée dans un grenier à Tarragone. Sur les indications d’un pèlerin, une jeune fille de Torredembarra lance l’alerte pour récupérer ce « quadre », comme disent les Catalans et honorer Rosalia. Chaque année, le 15 juillet, le tableau est de sortie dans les rues lors de la « Festa del Quadre de Santa Rosalia ». Une procession votive inscrite dans l’ADN de Torredembarra. Et ainsi, de génération en génération, de mères en filles, les femmes portent ce prénom au doux parfum de Rosalia. Comme celle que nous avons rencontrée à la terrasse du « Xaloquell », sur le Passeig Maritim. Femme forte à l’œil aguerri et au savoir intarissable, Rosalia ne jure aujourd’hui que par Torredembarra ! Son berceau familial, son fief, son coin de paradis. Attablée au restaurant, piloté depuis presque 70 ans par la famille Girol, Rosalia refait le monde de « Baix a Mar » avec Joaquina, la patronne. « Baix a Mar », le pittoresque quartier où les pêcheurs se sont installés dès le XVIIIe siècle.

Baix a Mar, quartier des pêcheurs

à peine quelques ruelles piétonnes parallèles à la mer et quelques perpendiculaires dont l’étroitesse n’est que promesse d’une vue spectaculaire sur l’azur. Et c’est ici, à fleur de sable qu’étaient autrefois alanguies à l’envi les barques de pêche. Joaquina et Rosalia ont sorti les albums photos de famille. La mer dans le sang, le poisson comme symbole de survie et les barques… Posées sur des rondins de bois, tirées à l’eau ou tractées par un câble relié à la mythique « màquina », incrustée sur un bloc de béton dans l’eau. Un « bloc » chevillé au cœur des Torrencs. Qui n’a pas nagé jusqu’au bloc ? Qui n’a pas plongé à partir du bloc ? Symbole de la jeunesse et d’une liberté salée. Un bloc dont il ne reste que la plateforme qui, durant 20 ans a accueilli une sculpture emblématique baptisée « Alfa et Omega » de l’artiste Rafael Bartolozzi. œuvre d’art désormais démontée face à l’usure du temps et au danger. Reste la sublime plage de « Baix a Mar », ses petites barques aux flancs généreux, son sable fin dont chaque grain mène vers la plage des Muntanyans. Il est là le trésor ! Un tableau grand format 100% nature. Sur plus de 2 kms, l’espace affiche une insolente virginité. Depuis 1992, la plage dite des Muntanyans est en effet classée parmi les espaces protégés de Catalogne. Marcher, s’arrêter, regarder, succomber. L’effet est immédiat. Sous la lame bleu-mer, les dunes nonchalantes caressent la mosaïque de marécages. Unie par le mariage des eaux salées et des eaux douces, la zone abrite une riche biodiversité. Habitat privilégié d’une faune et d’une flore singulières et fragiles, l’espace naturel des Muntanyans s’offre la chance d’une lumière rare. Comme une peinture soumise aux effets de lumière directe et de lumière reflétée sur l’eau. Ici, la nature s’écrit en délié, en fractionné magique. Ou comment l’œil erre en liberté, et l’âme flotte, drapée de volupté. Le « chemin Bleu », label de l’ADEAC veille à la préservation de ce patrimoine naturel inestimable. Bleu brillant et flèches de soleil éblouissantes pour une symphonie en naturel majeur. Torredembarra n’est que bascule vers l’ailleurs. à l’opposé de la zone humide des Muntanyans, immanquable : le phare. Dressé à flanc de la falaise del Roquer et mis en service le 1er janvier 2000, il présente la particularité d’être le dernier phare construit en Espagne au XXe siècle et surtout le plus haut de Catalogne ! Un phare qui éclaire le chemin du Roquer qui, comme son nom l’indique, s’incruste à même la roche sur tout le parcours. Il faudra se rendre à la fameuse Roca Foradada, la roche trouée située près du Port pour prendre ce splendide chemin de ronde parfaitement signalisé. Montées, descentes, crochets. Pins blancs, agaves ou encore passerines hérissées. Essences méditerranéennes à plein nez.

Zone protégée des Muntanyans

Là, un ancien fort de défense, puis le Balconet et la Pointe de Llança avant la crique du Codolar. Roches perchées, galets rincés par l’onde. La partition de ce chemin d’eau épouse le rythme d’une découverte entre plénitude et jubilation. Si Torredembarra est inévitablement tournée vers la mer et qu’elle en fait un de ses principaux atouts touristiques, il n’en demeure pas moins que son cœur historique regorge de pépites architecturales comme autant de précieux héritages historiques. à ce titre, on retiendra le Château des Icart, aujourd’hui siège de la Mairie de Torredembarra. Il s’agit là du seul bâtiment civil encore conservé et construit pendant la Renaissance catalane. Construit en 1565 sous les ordres du seigneur local Lluis Icart, le château fut conçu comme une résidence-forteresse en surplomb du village.

A tout Seigneur, tout château !

De forme carrée, flanqué de quatre tours, le Château dispose d’une cour à portiques et de nombreux éléments témoins du prestige du Seigneur. Pas de château sans muraille… Celle de Torredembarra conserve encore deux portails d’entrées construits au XVIIe siècle : celui de Padrines, situé entre la route de la Riera et la Plaça del Castell, et celui de la Bassa au niveau du Carrer Ample. Il reste également des vestiges d’un contrefort dans la rue Mañé i Flaquer. Un château, une muraille, une atmosphère… Pour que le tableau soit parfait, manquait la Tour de la Ville. Elle ne fait pas défaut ! Il s’agit même du bâtiment le plus ancien conservé à Torredembarra qui date probablement du XIIe ou du XIIIe siècle et s’inspire du style mudéjar, prolongement de l’art mozarabe. Certains considèrent que cette tour pourrait faire partie du vieux château. Elle se situe aujourd’hui juste devant l’église paroissiale de Sant Pere Apòstol dont la construction fut terminée en 1680. Ensuite, au XVIIIe siècle, l’église fut dotée d’une bonne partie de ses éléments architecturaux et ornementaux comme l’orgue baroque en 1705. C’est dans cette église qu’est précieusement conservée l’image de Sainte Rosalia, fêtée chaque année avec une immense ferveur. Croyances religieuses, légendes de pirates, tours de défense, déferlantes de pêcheurs, vagues de bonheur et toujours le bon goût des produits de proximité. à Torredembarra, on puise avec fierté dans la terre comme dans la mer. Impossible de quitter la cité sans avoir goûté aux traditionnels « Ranxets » ! Plus que de petits plats typiques, une véritable institution pour tout bon Torrenc qui se respecte. Les Ranxets, ce sont ces plats gravés dans l’abécédaire de l’alimentation locale depuis de nombreuses générations. Des recettes à base de produits frais de la mer et des champs. Des denrées que chaque famille pouvait aisément se procurer comme l’ail, la tomate, les fruits secs, l’huile, le vin, les légumes et les poissons de saison avec un fort penchant pour la morue et le thon dont l’estomac est conservé pour faire le fameux « bull »… Chaque année, des « Journées Gastronomiques » viennent honorer la Cuisine des Ranxets avec la participation de restaurants tels que Cal Silver, Can Lluís, El Capitán, Hostal Coca, La Cuina d’en Basili, Delicias, Las Palmeras, La Serra, La Terraza ou encore La Xeriueta. Avec seulement quatre campings et autant d’hôtels, Torredembarra a su résister aux sirènes d’un tourisme débridé. Ici, on privilégie le tourisme en famille, le mode auberge et proximité, comme le camping à taille humaine et à proximité immédiate des plages. Douce et sauvageonne à la fois, enthousiaste et mesurée, Torredembarra compte deux colles de castellers (pyramides humaines) : les Nois de la Torre et les Xiquets. Des hommes et des femmes solidaires, bien enracinés, bien ancrés dans leurs valeurs de partage et d’équilibre. Toujours animés par cette volonté d’aller plus haut et de toucher le bleu de ce ciel torrenc, miroir parfait de leur Méditerranée.

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