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Toulouges, le cœur vert

28 Sep Toulouges, le cœur vert

Capitale de l’oignon, village aux deux clochers rivaux et « Cité de la Pau i Treva », Toulouges est une grande malicieuse. Paisible au premier abord, il faut l’éplucher pour trouver en son cœur une multitude de couches plus surprenantes les unes que les autres. Berceau régional du street art, du hip hop et du rap, Toulouges la sportive aime avancer à contre-courant. Ville de parc et de canaux, elle se revendique source de culture. Avec une « Distillerie » d’un nouveau genre au menu, Toulouges n’a pas fini de pétiller !

J’habite à Toulouges ! » Et la réaction de fuser : « Moi aussi j’ai fait mes études à Toulouse… » éternelle ritournelle et quasi homonymie qui prête à sourire tant les deux sœurs de sons n’ont rien en commun. Si ce wwwn’est… un bulbe ! Car ici, à trois pas de Perpignan, l’oignon rose de Toulouse passe au rouge de Toulouges ! Et en pays catalan, tout le monde s’accorde pour déclarer Toulouges « capitale de l’oignon » à tunique rouge rubis. Le joyau, reconnaissable à sa forme ronde aplatie, est réputé pour sa chair parfumée, si douce en salade qu’on la dirait sucrée. Ne soyons pas tentés pour autant de réduire Toulouges et ses 7400 habitants à l’oignon. Gardons-en toutefois précieusement l’image et la métaphore d’une ville qui se découvre par couche. Otons les pelures une à une pour atteindre le cœur d’un ex-village devenu ville, où tout continue à couler de source… Car le saviez-vous ? On a coutume de parler de « l’or blanc de Toulouges », tellement la cité regorge d’eau ! C’est d’ailleurs elle, l’eau, qui a assuré la prospérité de l’agriculture dans ce coin du Roussillon. Toulouges a en effet la particularité d’être situé au cœur d’un extraordinaire maillage de canaux et de recs, dont le « Rec de Perpinyà », l’ancien ruisseau royal, autrement appelé « Las Canals ». Parfaitement irriguée et particulièrement fertile, Toulouges a de tout temps attiré maraîchers et primeurs. On se souvient également de la Font Vella, cette fontaine d’abondance qui alimentait le village en eau potable. Ici dans la capitale de la « ceba », il faut remonter à 1829 pour voir jaillir l’eau du premier forage. Fontaines, puits artésiens, bassins, lavoirs et château d’eau jouent les décors-trésors. Et le fleuron ici, c’est la Brasserie Milles qui puise dans la ressource naturelle et capte son eau au cœur de Toulouges à près de 100 m de profondeur. Une eau de grande qualité sans modification de la ressource, sans retraitement. « C’est assez paradoxal, mais il faut finalement un vrai savoir-faire complexe pour exploiter quelque chose de pur ! » explique Laure Milles, arrière petite-fille du fondateur de cette entreprise à la solide réputation, née en 1928.

« A plein poumon vert »

Chez Milles, on produit toujours et encore de l’eau de source sous l’appellation « Sémillante » ainsi que des boissons gazeuses comme la Limonette, chère au cœur des Catalans. Bouillonnante et pétillante en son cœur, Toulouges cultive sa chance de pouvoir respirer « à plein poumon vert » grâce à Clairfont. Imaginez un parc de 6 hectares au centre duquel se dresse une maison de maître des années 30, transformée en mairie depuis 1985. Un éden luxuriant où s’épanouissent librement 100 essences méditerranéennes, couplé à un petit étang sur lequel voguent avec élégance deux cygnes et une ribambelle de canards, de tortues et autres poissons, havre de paix garanti. Par les allées, le Parc de Clairfont propose également de nombreuses activités pour les enfants, dont le parc accrobranche « Clairfont Aventure ». Quant à la réputation du So’Oh et de la Guinguette de Clairfont, elle n’est plus à faire, tant ces lieux de restauration « champêtre-chic » respirent la convivialité et la bonne humeur. Entre  les deux pôles Perpignan et Thuir, Toulouges a su inscrire son effet « crochet-gagnant » ! Clairfont est même devenu « the place to vi » pour le salon des vins nature Indigènes qui réunit plus de 100 vignerons des deux Catalogne et d’Occitanie. C’est encore une fois dans l’écrin de Clairfont que se tient depuis deux ans le « Championnat du Monde de la Saucisse Catalane ». Un événement XXL particulièrement couru et déjà « viscéralement » attaché à Toulouges. Indéniablement, Toulouges respire et transpire sa terre, son terroir et revendique son identité. Avec cet esprit de paix, de quiétude et d’esprit de partage qui force le respect. Il n’y a pas de hasard…

Hâvre de paix

Car c’est de Toulouges qu’est parti le premier message universel de paix, porté par l’abbé Oliba en 1027 puis prolongé par le concile de 1064 à l’origine des Corts, le parlement catalan. Pour stopper la folie meurtrière des guerres intestines, Oliba avait convoqué à Toulouges, le 16 mai 1027, le synode de « Treva de Deu » (Trêve de Dieu). La première trêve hebdomadaire consistait à suspendre les hostilités du samedi 15h à la première heure du lundi. Les contrevenants risquaient alors l’excommunication. Les périodes où il est interdit de combattre s’allongent au fil des ans. La 1e commémoration de cette trêve médiévale sacrée qui offrait une période de calme et de non-violence fut célébrée en 1966. Et depuis, chaque année, en mai, Toulouges s’offre sa fête de la Pau i Treva. Un hommage vibrant à la tradition, comme une parenthèse dans l’agitation du monde actuel. Au coucher du soleil, une procession paisible se forme, emmenant les visiteurs vers l’église romane du village. Là où brûle une bougie, symbole de paix. Bien plus qu’un simple événement festif, la Pau i Treva est l’expression vivante d’une tradition perdue, rappelant à tous l’importance de la paix, de la tolérance et de l’harmonie dans un monde en perpétuel mouvement. Une invitation à ralentir, à se reconnecter avec la nature et à redécouvrir la simplicité de la vie. Et s’il manquait encore une touche pour célébrer le parfait tableau de la vie, Toulouges a clairement opté pour la culture ! Port d’attache départemental de l’art du graffiti et du hip hop, la cité a renversé les codes à la fin des années 80 pour amorcer la vague créative qui allait déferler dans les années 90. De nombreux graffitis font encore écho à l’extraordinaire rampe de lancement toulougienne (voir encadré). Avec sa salle de spectacles et son cinéma El Mil.lenari, avec sa médiathèque, son marché de créateurs, ses 17 clubs sportifs pour 2000 licenciés, la ville rayonne. Côté sport, on ne manquera pas de citer Hugo Benitez, jeune basketteur professionnel formé à Toulouges sélectionné parmi le top 12 des joueurs français du championnat national Betclic Élite. Le meneur toulougien qui joue actuellement à Bourg-en-Bresse a été qualifié avec les Bleus pour la Coupe du Monde de Basket au Japon, aux Philippines et en Indonésie. Et, signe de son attachement à ses terres natales, il porte symboliquement le numéro 66 sur son maillot ! Benitez rend ainsi également hommage au TBA, Toulouges Basket Association, meilleur club de basket des Pyrénées-Orientales. Côté rugby à XIII, Toulouges peut aussi se targuer d’avoir formé de grands joueurs professionnels à l’image de Morgan Escarré et Eloi Pelissier qui ont tous deux fait leurs débuts en Superleague avec les Dragons Catalans. Quand un village devient ville, on l’accuse de perdre son identité. La belle Toulouges a su rebondir et tord le cou aux clichés. La cité de la Pau i Treva s’est récemment offert une création « Toiles du Soleil » à son nom. Chaque couleur tire délicatement le fil d’un trait identitaire : le vert et le rouge emblématiques de Toulouges, le rouge rubis pour ses oignons réputés internationalement, le jaune clin d’œil au soleil, délicatement éclaboussé de bleu en écho à l’eau au fabuleux maillage de canaux.

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